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Objectif Cinéma (c) D.R.

L'effroi que parvient à dégager Roberto Succo tient donc à un vertige de l'identité. Ce personnage repose sur une vacuité ontologique. Et c'est de cette béance que procède la folie et le mal. On est devant cet homme comme devant un grand vide : l'abîme qu'est toute personne si elle est dépouillée de son identité propre. Si les scènes d'action sont si belles, c'est que, au-delà de leur brio formel, elles traduisent concrètement cette idée de vertige et ont un réel poids symbolique. Ainsi, dans la seconde partie, la séquence de la poursuite en voiture, véritable morceau de bravoure, entre Succo qui a pris en otage une automobiliste institutrice et les forces de police, apparaît comme une fuite en avant insensée et destructrice, une sorte de précipice sans fond dans lequel est entraîné le personnage. A ce moment-là, sans origine (il a tué sa famille), sans lien (Léa l'a quitté), il n'a aucun but : c'est un être vide condamné à un mouvement perpétuel, absurde. D'ailleurs sa folie ne l'empêche pas d'être lucide puisqu'il dit à l'institutrice qu'elle roule avec un cadavre. De ce point de vue, il incarne une figure tragique moderne.

Ce principe d'inexistence ne constitue pas seulement un axe directeur permettant de traiter le personnage, il confère aussi à la mise en scène une forte cohérence symbolique. Ce n'est pas un hasard si dans la dernière scène, montrant la découverte par un gardien du corps mort de Succo dans sa cellule, la tête du cadavre est recouverte d'un sac de plastique noir. D'après le livre de Pascale Froment, c'est ainsi que cela s'est passé. Mais d'une part cette image fait écho à la scène primitive de la découverte du cadavre des parents dont la tête est également recouverte d'un sac plastique. Mais surtout ce vidage invisible, tel un dernier masque, ne peut que confirmer cette dimension de vide, d'inexistence, d'absence d'identité. Ultime dérobade d'un être qui, jusque dans la mort, ne cesse de s'échapper, de disparaître.

  Objectif Cinéma (c) D.R.

Cédric Kahn confirme qu'il est le cinéaste français le plus percutant et le plus efficace du moment. Malgré le titre de son troisième film, rien de moins ennuyeux que son cinéma qui tend vers l'action. Roberto Succo apparaît déjà comme un grand film du genre, le portrait d'un assassin, témoignant d'une rigueur et d'une intelligence admirable dans le traitement de ce sujet très casse-gueule. Mais ici le film noir, voire le film d'action, fondé sur un cas réel, donne lieu à une interrogation métaphysique sur le mystère de la personne. Roberto Succo, dans une optique toujours très réaliste, poursuit la veine absurde du cinéma de Kahn, amorcée avec L'Ennui.



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2003 Feux rouges avec Jean-Pierre Darroussin, Carole Bouquet
2000 Roberto Succo avec Stefano Cassetti, Isild Le Besco
1998 L'Ennui avec Charles Berling, Sophie Guillemin
1996 Culpabilité zéro avec Vincent Berger, Marie Mure
1993 Trop de bonheur avec Estelle Perron, Caroline Trousselard
1991 Bar des rails avec Fabienne Babe, Brigitte Rouan
1990 Les Dernières heures du millénaire (CM) avec Nathalie Richard
1989 Nadir (CM) de Claude Berri