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Ce dernier film d'Ozu est aussi le plus
simple de tous ses films. Les ingrédients en sont familiers.
L'histoire rappelle celle de Fin d'Automne ; les couleurs
sont atténuées ; l'angle de prise de vue est invariable. Tout
est à sa place, rien n'est de trop. En même temps, nous assistons
à une extraordinaire intensification de l'atmosphère générale
du film. C'est à nouveau l'automne, mais un automne tirant
à sa fin. La présence de l'hiver étant proche dans de nombreux
films, dans Le Goût du Saké, l'hiver commence demain.
Ozu se montre d'une attention douce et sage comme elle ne
l'a jamais été.
Et, Herbes Flottantes mis à part, les couleurs et la
lumière sont ternes et peu profondes dans les films de cette
période. Les ocres, les kakis, les couleurs sombres et passées
y dominent, ajoutant au ton triste et à la fois détaché, aigre-doux,
de son œuvre. Désormais, la solitude, la résignation et la
mort planent. Déjà peuplé de peu, à la simplicité dénudée
et solennelle, son monde se dépouille et semble voguer vers
ce rien, suave et cruel, qui l'élève, le sauve et le nie.
Et c'est sans doute dans cette négation qu'il trouve résonance
en nous. Aussi, dans sa constance, sa hauteur, sa vitesse.
Ses silences. Aussi bien dans les gestes, les démarches, les
intonations, les vêtements, les décors, les paysages, les
lumières, les couleurs, la grosseur des plans, la durée, la
succession. Dans tout ce qui existe. Ce qui est explicite.
Dans la plus profonde noirceur subsistent toujours l'attention
et l'accueil. Ce sens de l'hospitalité et de la convivialité
essentiel à la présence du spectateur. Ce qui, ajouté au présent
qui passe, sans attente ni souvenir, rend l'effet cinéma à
lui-même par la suspension de la fiction, de l'action, du
mouvement.
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Né le 12 décembre 1903 à Tokyo, où il meurt le
12 décembre 1963, Yasujiro
Ozu entre aux studios Shochiku comme assistant-caméraman
en 1923, dirige ses films à partir de 1927 et
n'adhère au parlant qu'en 1936. Beaucoup de ses
films muets, mais aussi des parlants, ont disparu,
d'autres ne sont pas accessibles facilement. Ozu
semble s'être consacré essentiellement à son travail,
et en dehors de cela à la littérature, la boisson,
la peinture et la musique. Sa découverte en Occident
a été surtout l'œuvre des critiques et théoriciens
d'origine américaine : Donald Richie, Noël Burch,
David Bordwell.
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