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Donnie Darko (c) D.R. DONNIE DARKO
de Richard Kelly
Par Sylvain MILLIOT


SYNOPSIS : Donnie Darko est un adolescent presque comme les autres. Son intelligence et son imagination en font une personnalité complexe. Il a pour ami Frank, une créature que lui seul peut voir et entendre. Lorsque par miracle, Donnie échappe à la mort, Frank lui propose un étrange marché. La fin du monde approche et Donnie doit accomplir sa destinée... Dans la petite ville tranquille, des événements bizarres surviennent : le collège est mis à sac et une espèce de gourou new age, Jim Cunningham, est chargé de ramener les élèves sur la bonne voie. Donnie sait que derrière tout cela se cachent d'inavouables secrets. Frank l'aidera à les mettre à jour, semant le trouble dans la communauté. L'évolution du jeune garçon déroute et inquiète sa famille, sa psy, ses amis, et surtout sa copine Gretchen... Avec l'aide de son professeur de physique, Donnie découvre que rien de ce qui se passe n'est dû au hasard. Malgré ses efforts, la survie de ses proches et du monde est menacée. Lui seul peut agir, mais il doit faire vite. Frank le lui a dit...

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UNE ADOLESCENCE AMERICAINE


Richard Kelly, 26 ans, réalise un film surprenant, à la croisée de la S-F, du teenage movie et de la critique sociale.

  Donnie Darko (c) D.R.
Le cinéma américain qu’on aime tant détester (ou désespérer d’aimer, ce qui revient au même) a su en définitive se construire autour d’une chose qui aujourd’hui encore, fait trépigner tous les épigones de Scorcese ou Kubrick et fondre d’aise les jeunes gens soucieux de se réunir autour de quelques valeurs ésotériques. Cette chose fondatrice, c’est le genre. Le genre a son précédent en littérature, vieille mère prussienne dont le cinéma s’est toujours senti le fils indigne, vivant éternellement son adolescence en bombant le torse pour se croire unique. D’adolescence, il est toujours question dans le cinéma et la littérature de genre. Déjà parce que l’adolescent est le public idéal : il se trouve au moment de son existence où il s’ouvre à la brillance des possibles et découvre dans la science-fiction, le fantastique, ou le polar (pour parler des 3 grands genres) l’exemple d’une fiction élaborée au contact du possible. Ensuite parce que le cinéma américain a su faire de l’adolescent à la fois son public privilégié, mais surtout l’acteur sans la crédulité duquel aucune de ses fictions ne tiendrait. Il s'écroulerait si ces milliers de spectateurs lui enlevaient cette part d’absolu qu’ils lui délèguent à chaque fois qu’ils se risquent en salle. Il en va ainsi de Star Wars ou du Seigneur des Anneaux, existant au travers de cette crédulité infinie des jeunes ados, et partageant entre les générations successives le même plaisir de la célébration de fiction totale (On renvoie ici aux travaux de Jean-Marie Scheffer sur la fiction dans Star Wars.).

Ces récits ont le mérite en effet de fournir un univers autarcique, fonctionnant selon ses règles et créant ses propres références. C’est le propre de la S-F (et de tous ses dérivés : merveilleux, heroïc-fantasy, space opera, anticipation) ou du fantastique, de proposer des mondes impossibles, s’autorisant par là toutes les licences poétiques qui font la richesse de leurs récits.

Donnie Darko (c) D.R.

Mais le film de genre n’est réellement créateur que lorsqu’il s’affranchit de ses règles et échappe aux conventions de son propre domaine. La liste des grands maîtres du genre se confond souvent avec celle des novateurs en cinéma : Hitchcock bien sûr qui a élaboré le thriller et l’a achevé, Dario Argento qui a créé un autre type d’horreur, Kubrick qui s’est quasiment acoquiné à tous les genres, à chaque fois en les recréant, Georges Franju qui a introduit l’étrange dans l’épouvante, Tarkovski creusant le sillon d’une S-F délibérément métaphysique avec Stalker et Solaris.

Il y a un genre ne devant rien à la littérature qui s’est créé à l’intérieur même du cinéma américain, et dont le sujet autant que le public est l’adolescent dans toute sa panoplie : c’est le teenage movie. Le teenage movie a son histoire, ses chefs d’œuvre, ses ratages, ses codes, ses transgressions. Il peut tenir autant du film d’horreur pur, que de la S-F intelligente, ou de la comédie de dépucelage graveleuse. Les concurrents ne manquent pas dans ces catégories : Vendredi 13, Scream, War Game, American Pie, etc.