Par ailleurs, la distanciation et la
mise en abîme ne sont pas que des procédés,
ce sont des éléments du récit en ce que
la réalité est constamment approchée
par l'intermédiaire de représentations et de
reflets (film, vidéo, télé, médias).
C'est pourquoi il y a autant d'écrans et que les personnages
sont la plupart du temps des spectateurs. Les jeunes passent
leur temps à regarder des films d'horreur; tandis que
la journaliste télé préfère filmer
le réel et assister sur écran à l'événement
plutôt que de le vivre directement. On peut ici penser
à cette scène anthologique où une caméra
vidéo placée par elle dans la maison lui donne
à voir ce qui s'y passe. La réalité est
alors dupliquée et renvoyée en miroir à
l'infini. En effet, le jeune Randy regarde une scène
basique d'un film d'horreur : un tueur s'approche d'une jeune
fille et Randy crie pour qu'elle se retourne, au moment même
où l'assassin est derrière lui. Cette situation
qui reproduit la scène du film est à son tour
reproduite puisqu'elle est diffusée sur l'écran
de contrôle de la journaliste. Mais comme l'image arrive
avec trente secondes de retard, l'assassin est déjà
derrière elle et reproduit à l'identique les
scènes déjà vues. Triple mise en miroir,
vertigineuse : nous regardons un personnage menacé
qui regarde un personnage menacé qui lui-même
regarde un personnage menacé. Que dire de cette scène
sinon que l'événement est noyé sous ses
représentations ? Le réel, sous ses masques
et reflets, disparaît, vidé de sa substance.
De telle sorte que la règle fondamentale de Scream,
évidemment ignorée des protagonistes, semble
être la suivante: meurt, c'est-à-dire " est
puni ", celui qui n'a pas un rapport direct avec
le réel, qui commet une erreur de regard, qui prend
le reflet pour l'événement lui-même, à
l'instar du proviseur qui a peur de son image dans le miroir
alors que l'assassin est derrière la porte. L'héroïne
Sydney est celle qui tient le juste regard, qui fait face
aux réalités et, si j'ose dire, ne se laisse
pas conter. Dans ce film post-moderne,ce n'est
plus le péché (le sexe) qui est sanctionné
mais une faute intellectuelle, voire philosophique : simplement
la relation au monde. Ainsi, outre une satire sociale d'une
certaine Amérique, Scream nous propose plus
profondément une critique féroce de la société
du spectacle.
Pourtant, si Craven est ce cinéaste
avisé qui démonte les règles de son propre
spectacle, il montre aussi qu'elles fonctionnent toujours.
On a beau être un spectateur lucide et critique, on
sursaute et on y croit ! La distance n'empêche pas la
crédulité et l'illusion. Un peu comme la journaliste
qui, alors qu'elle sait que l'imagelui parvient avec
retard, se met à croire au caractère présent
de l'événement et avertit en vain le personnage
de Randy. Admirable métaphore de notre condition de
spectateur.
2003Pulse
de Wes Craven avec Kirsten Dunst 2003 Cursed
de Wes Craven 2002Alice in wonderland de Wes Craven 2002With a friend like Harry de Wes Craven
avec Rufus Sewell 1999Scream 3 de Wes Craven avec Neve Campbell,
David Arquette 1998La Musique de mon cœur de Wes Craven avec
Cloris Leachman 1997Scream 2 de Wes Craven avec Neve Campbell,
David Arquette 1996
Scream de Wes Craven avec Neve Campbell, David
Arquette 1995Un vampire à Brooklyn de Wes Craven
avec Eddie Murphy 1994Freddy sort de la nuit de Wes Craven avec
Robert Englund 1991Le Sous-sol de la peur de Wes Craven avec
Brandon Adams, 1989Shocker de Wes Craven avec Michael Murphy,
Richard Brooks II 1987L'Emprise des ténèbres de
Wes Craven avec Bill Pullman 1986L’amie mortelle de Wes Craven avec Matthew
Laborteaux 1984Les Griffes de la nuit de Wes Craven avec
Robert Englund 1981La Ferme de la terreur de Wes Craven avec
Sharon Stone 1980La colline a des yeux de Wes Craven