Preuve en est, cette réplique
à double sens prononcée par Menou-Segrais au
tout début du film : " Là où
Dieu vous appelle, il vous faudra monter, monter ou vous perdre.
N’attendez aucun secours humain. En doutant de vos forces
et des desseins de Dieu sur vous, vous étiez dans une
impasse. Je vous remets sur votre route. Je vous donne à
ceux qui vous attendent, dont vous serez la proie. "
Menou-Segrais sera également présent à
la fin du film pour découvrir la dépouille de
Donissan dans le confessionnal, ou plus justement contempler
l’œuvre du Diable. Comme dans les deux scènes de nuit
du film, dans lesquelles Donissan a dû affronter le
Mal, cette dernière image voit intervenir un faisceau
lumineux glacial frappant uniquement le visage du prêtre,
laissant le reste de l’image dans la pénombre. De plus,
ces trois scènes sont les seules à être
agrémentées de musique, et pas n’importe laquelle,
puisqu’il s’agit de la première symphonie d’Henri Dutilleux,
œuvre très sombre qui illustre parfaitement les tourments
métaphysiques les plus profonds de l’âme de Donissan.
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Sous le soleil de Satan
est un film qui hante, non pas uniquement parce que l’on
assiste à l’effondrement d’une âme tourmentée
qui se décompose sous l’envahissement mortel du doute,
mais également par la fascination qu’éprouve
Pialat pour l’inexplicable, comme si le fait d’avoir réalisé
ce film, avait réussi à faire vaciller en lui
son athéisme. Comme si l’auteur, en cherchant à
prouver que le sacré n’était atteint qu’à
travers le Mal, s’était rendu à la même
évidence que Kant : à savoir qu’il est
impossible de démontrer que Dieu existe, ou qu’il n’existe
pas. Mais la portée du film est bien plus grande, puisque
le sacré mis en jeu dans le film dépasse l’existence
de Dieu, et la grâce est au-delà de la pratique
du Mal (Donissan condamne sans appel Mouchette, la poussant
ainsi au suicide). L’essence du sacré ne se laisse
donc appréhender dans ce film, qu’à partir de
la vérité de l’être. Il faut que le sacré
demeure caché pour que persiste le besoin d’accéder
à l’inaccessible. La force du film de Pialat est donc
de réussir à questionner le cinéma sur
sa capacité à visualiser l’indicible. Vouloir
montrer l’immatériel, l’invisible représente
véritablement le grand défi du septième
art. Pialat l’a compris, le seul moyen de donner corps à
l’invisible est de filmer les effets qu’il a sur le visible.
Et c’est précisément cet aspect du film qui
à la fois attire et terrifie. Ne dit-on pas que toujours
voir davantage est un désir dangereux. Le cinéma
serait-il une boîte de Pandore…
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1- Joël Magny, Maurice Pialat, collection
auteur, éditions des Cahiers du cinéma,
p 104.
2 - Jean Collet, revue
Etude, septembre 1987, p231
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1995 Le Garçu avec Gérard
Depardieu, Géraldine Pailhas
1991 Van Gogh
avec Jacques Dutronc, Alexandra London
1987 Sous le soleil
de Satan avec Gérard Depardieu, Sandrine
Bonnaire
1985 Police avec
Gérard Depardieu, Sophie Marceau
1983 A nos amours
avec Sandrine Bonnaire, Evelyne Ker
1980 Loulou avec
Isabelle Huppert, Gérard Depardieu
1978 Passe ton bac
d'abord avec Philippe Marlaud, Sabine Haudepin
1974 La Gueule ouverte
avec Nathalie Baye, Philippe Léotard
1972 Nous ne vieillirons
pas ensemble avec M. Meril, M. Risch
1971 La Maison des
bois avec Barbara Laage, Jacqueline Dufranne
1968 Lugdunum
1968 Tauromachie
en France
1968 L’enfance nue
avec Raoul Billerey, Michel Tarrazon
1967 De la mer jaillira
la lumière
1967 Paris étudiant
1966 Les Champs-Elyseees
de Maurice Pialat, Georges de Caunes
1962 Janine de
Maurice Pialat
1961 La Corne d'or
1961 L'Amour existe
1961 Pigalle
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