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Dans The world
is not enough, le procédé consistant à
donner un temps de répit au méchant pour l’affichage
de ses passions avant sa mort est clairement et génialement
signifié : en effet le mercenaire dont les plans
menacent l’avenir de la planète est en proie à
un mal incurable : il possède dans sa tête
une balle qui le condamne à une mort certaine.
Il devient ainsi la fascinante figure tragique de celui qui
n’a plus rien à perdre. De plus, cette balle a atteint
ses capacités nerveuses, lui engendrant une absence
de douleur et de plaisir. Vient s’ajouter à la complexité
du personnage, son amour pour Electra, jeune femme interprétée
par Sophie Marceau, qu’il a enlevé avant qu’elle n’éprouve
pour lui un amour né du syndrome de Stocholm.
La relation entre ces deux ennemis de James Bond est donc
particulièrement tordue et tragique. Elle apparaît
au spectateur vers la moitié du film, et la perception
de ce dernier s’en trouve alors révolutionnée :
la tension qui liait James Bond à son ennemi se mue
en tension entre Electra et ce dernier.
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Un double mouvement
vient irrévocablement les séparer, et c’est
ce mouvement qui apporte toute la beauté au film :
elle plonge dans le mal, sert ses plans pour mieux le satisfaire
et montre pour lui un mélange de compassion maternelle
et d’élan sensuel qui ne pourra jamais aboutir puisque
lui ne peut pas jouir… De son côté il échappe
de plus en plus au monde, glisse vers la mort et par la-même,
renonce presque à la pérennité de ses
projets machiavéliques. C’est Electra qui petit à
petit s’investit de plus en plus dans le mal et donc dans
la passion et la vie, alors que lui devient un fantôme
étrange et beau qui échappe au bien et au mal
et porte sur elle un regard à la fois tendre et désabusé.
Ce qui est magnifique dans ce film, c’est que cet homme condamné
rempli sa fonction de méchant jusqu’au bout, tout en
nous criant avec ses regards et ce que l’on sait de sa situation :
" A quoi bon ? "
Dans le nouveau James Bond, Die another day, c’est
un autre complexe qui est mis en place. En effet, dans la
séquence traditionnelle du générique,
James Bond combat un colonel nord coréen que l’on croit
finalement voir périr dans une cascade. Or celui-ci
réapparaît quelques séquences plus tard…
Sous les traits d’un anglais typique !
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Le colonel qui a survécu
à sa chute dans l’eau poursuit donc ses projets néfastes
en se masquant grâce à une chirurgie esthétique
complexe sous les traits d’un riche, jeune et beau fabricant
de diamants anglais. Il est aidé pour cela par un subordonné
coréen qui a dû lui aussi subir une transformation
par la faute de 007. En effet, il a reçu des éclats
de balles infestées de plutonium dans le visage et
a dû subir une cure dans un centre très spécial.
Il en ressort avec des yeux bleus, et un visage blanchi et
serti des éclats de balles apparaissant comme des perles
argentées sur la peau. Il apparaît ainsi complètement
lunaire et magnifique, avec son look de Pierrot maléfique.
Le film met en scène deux alliés asiatiques,
qui par la force des choses ont dû renier leur identité
physique. La vraie question que pose cet épisode, à
travers une intrigue assez rocambolesque, est la suivante :
comment assumer son identité lorsque les événements
nous poussent à passer outre la morale ?
Ce qui est fascinant ici, c’est que tout ce dilemme passe
uniquement à travers la métamorphose physique
des deux personnages. La scène la plus pathétique
et belle du film est sûrement celle où le père
du colonel ne le reconnaît pas à travers les
traits du jeune anglais qu’il est devenu.
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