SYNOPSIS William 
                    Harford et sa femme Alice mènent la vie banale d'un jeune 
                    couple new-yorkais... Aussi, lorsque Alice révèle à son mari 
                    ses fantasmes adultères, William, dévoré par cette troublante 
                    confession, cède à la jalousie et au jeu de la tentation. 
                    Il entame alors un périple nocturne où ses obsessions le mènent 
                    en des lieux étranges et mystérieux... 
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                   ONIRISME 
                    DU DESIR, DESIR ONIRIQUE 
                     
                     
                      
                  
                     
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                  L'affiche, déjà, ne laisse 
                    pas d'étonner : sous le titre, un couple s'embrasse ou plutôt 
                    semble s'embrasser - après tout, leurs lèvres se touchent 
                    à peine. Vont-ils s'embrasser ? Ont-ils fini de s'embrasser 
                    ? Le doute s'installe, alors même qu'ils semblent si proches. 
                     
                    Le doute dans le baiser prend une dimension supérieure lorsque 
                    l'on s'attarde sur l'œil de la femme, cet œil ouvert et tourné 
                    on ne sait où, vers un ailleurs qui n'est certainement pas 
                    son compagnon. On ne sait rien de ce couple, mais déjà, le 
                    sentiment s'impose que quelque chose ne va pas : alors que 
                    l'homme a les yeux fermés, il y a cet œil ouvert, au centre 
                    de l’image ; il est comme sa clé de voûte, son principe d'agencement. 
                    Il est aussi sa source de lumière, il en inonde le visage 
                    de la femme. Cet œil tourné et ouvert, précisément au moment 
                    où il devrait être fermé, est un œil qui déjoue et qui ne 
                    fait pas ce qu'il devrait faire au moment où il devrait le 
                    faire.(1) 
                     
                    En un sens, l’ouverture est comme une fuite et, dans ce 
                    repli, l’œil entraîne l'esprit. Alors, ce dernier se sépare 
                    du corps, à présent simple chair, simples réflexes, simples 
                    lèvres. Et un esprit qui s'envole, c'est la preuve d'un cœur 
                    qui tiédit : « tu peux toujours m'embrasser, semble dire 
                    la femme, ce ne sont jamais que mes lèvres que tu baises : 
                    je suis ailleurs ». Peut-être ce couple s'est-il embrassé, 
                    peut-être va-t-il s'embrasser. Mais l'œil montre que pour 
                    la femme, le cœur n'y est plus, alors même que son compagnon, 
                    par ses yeux clos, paraît tout entier présent dans ce baiser. 
                     
                   
                  
                     
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                  L’image, par essence muette, 
                    est paradoxalement éloquente : à travers elle, c'est tout 
                    le malaise du couple, l'enrayement de sa subtile mécanique 
                    qui sont dévoilés. Acier du regard, simulacre du baiser : 
                    Kubrick nous convie à une histoire de l'œil, l'histoire d'un 
                    couple qui ne regarde plus dans la même direction au même 
                    moment. 
                     
                    La scène d'ouverture montre le couple, Bill et Alice, en train 
                    de se préparer, sans doute pour aller à une soirée. Ils sont 
                    en retard, ils se pressent. Alice demande alors à Bill ce 
                    qu'il pense d'elle, de sa tenue, de ses cheveux. Distraitement, 
                    alors qu'il n'est plus dans la même pièce qu'Alice, il lui 
                    lance : « tu es toujours superbe ». La phrase, machinale, 
                    est lâchée sans intensité ni passion. Alors que ces mots demandent 
                    à être redoublés par un regard, alors que la beauté de cette 
                    femme exige d'être dite et, surtout, regardée, Bill répond 
                    sans voir. La réponse est comme muette, parce qu'aveugle : 
                    le regard en constitue la substance. Une bouche qui n'a rien 
                    à voir est une bouche qui n'a rien à dire, ou alors elle parle 
                    à vide. En amputant sa phrase du regard, Bill la condamne 
                    à ne porter sur rien. La scène est d’importance : elle 
                    souligne toute l’usure d’un regard qui, à force d’évidence 
                    et de proximité, s’est rogné. 
                     
                     
                   
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