« L’idiot éprouve le besoin de voir les données d’un
problème plus profond que la situation < , écrivait
Deleuze à propos du film qu’Akira Kurosawa consacrait à Féodor
Dostoievskien 1951. Chez Kurosawa, où tout est point de vue
et témoignage, ou bien spectacle, dans le corps du samouraï
entièrement dédié et entraîné à la lutte, ou, dans ses « Jidai-geki »
plus tardifs comme Kagemusha (1980), ou Ran (1985),
où le jeu des couleurs et des carnations tient une part essentielle
et parfaitement incluse dans l’action filmée, c’est l’innocence
du regard porté qui permet, plus que la critique compassée de
la société japonaise, la découverte d’une dualité entre une
société où tout est surcodé, et l’homme libre.
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On trouve cette dichotomie mise en scène
et explicitée au travers de deux de ses acteurs, le premier,
Shimura Takashi, qu’il emploi d’ordinaire pour son âge avancé
et comme parabole de sapience, comme le dépositaire des coutumes,
la figure du samouraï, Toshiro Mifune, quant à lui, plus jeune,
et largement exploité pour son impulsivité et sa fougue, joue
le marginal, le ronin.
Ran, ou « chaos » en japonais, est significatif
d’une méthode alors éprouvée, tout, chez Kurosawa, participe
à l’action, des fanions bariolés aux armures sombres couronnées
de symboles féodaux. C’est ce paradoxe, si ostensible dans
les guerres claniques et l’opposition des hommes qui fait
l’œuvre de Kurosawa, ce chaos qui sous-tend les relations
entre les protagonistes, qui transparaît dans un environnement
d’apparence structuré et ordonné. La métaphysique est présente
également, dans ses travestissements et ses accoutrements,
et l’acte brutal dans sa simplicité la plus crue et la plus
élémentaire devient la confrontation de traditions comme de
volontés de puissance.
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Si Kurosawa débute sa carrière par la transposition
d’un mythe typiquement japonais, en adaptant pour l’écran
la biographie du fameux judoka Sugata Sanhiro pour le film
éponyme et bien souvent sous-estimé où il collabore, pour
la première fois, avec l’acteur Shimura Takashi , la reconnaissance
de ses pairs viendra avec la relecture de quelques-uns des
grands mythes européens, qu’il s’agisse de mythes fondateurs,
incontournables, comme Shakespeare ou Dostoievski que lui
fait découvrir son frère aîné, ou d’autres mythes populaires
comme Georges Simenon, auteur qu’il affectionne volontiers
avec Chien Enragé.
Ses premiers films sont remarqués rapidement, et sont souvent
couronnés par de prestigieuses récompenses, le « Kokumin
Eiga » pour Sugata Sanshiro (1943), le « Mainichi
Eiga » pour L’Ange Ivre où il découvre Toshiro
Mifune, récompensé comme meilleur film de l’année 1948, et
pour la qualité de sa photographie.
Ses premiers films sont remarqués rapidement, et sont souvent
couronnés par de prestigieuses récompenses, le « Kokumin
Eiga » pour Sugata Sanshiro (1943), le « Mainichi
Eiga » pour L’Ange Ivre où il découvre Toshiro
Mifune, récompensé comme meilleur film de l’année 1948, et
pour la qualité de sa photographie.
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