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FRANJU, CE N’EST QUE LE DEBUT…

  Les Yeux sans visage (c) D.R.

Le genre «fantastique» a fait sa modeste apparition en France dans le début des années 60, quasiment en même temps que le gore aux Etats-Unis. En réalité, c’est une preuve que nous sommes en parfait décalage. Par exemple, il faudra attendre 1990 pour voir en France le premier film gore français, incarné sous les traits de Baby Blood d’Alain Robak. Restons en 1960, année où Georges Franju signe un authentique chef-d’œuvre du genre : Les Yeux sans visage, dans lequel un chirurgien tente de remodeler le visage de sa fille, rendue méconnaissable à la suite d’un accident de voiture. Pour cela, il effectue des greffes de peau qu’il aura prélevées sur des jeunes filles. Dans une ambiance d’inquiétante étrangeté, ce film nous rappelle que sous chaque bon film fantastique, se trame une superbe histoire d’amour. Le personnage principal, interprété par un Pierre Brasseur exceptionnel, est un homme déphasé qui bascule dans la criminalité, non pas par simple plaisir sadique, mais par amour pour sa fille. De ce voyage au bout de l’enfer, on n’oublie pas l’atmosphère envoûtante, les dialogues de Boileau-Narcejac, la musique délicieusement lancinante de Maurice Jarre, la magnifique photo en noir et blanc, la sublime dernière séquence… Bref, pléthore d’atouts qui transforment ce premier essai en extraordinaire réussite. Une fois n’est pas coutume, les quelques réussites françaises ont immédiatement leur «repliquant» ricain. Ici, ce sera Corruption (1967) de Robert Hartford-Davis qui remplace la relation père-fille par une relation homme-femme. Mais que l’on se rassure : n’est pas Franju qui veut.

Il faudra néanmoins attendre 1967 pour voir l’apparition de Jean Rollin, notre Ed Wood à nous, qui, échappé de la Nouvelle Vague, n’a jamais caché son goût pour les films atypiques et les productions fantastiques incongrues. Son premier film, Le Viol du Vampire, annonce magistralement la couleur : il met en scène le voyage nébuleux de trois hommes célibataires venant de Paris, qui débarquent dans une étrange demeure où des femmes perdent progressivement la raison. Pourquoi ? Peut-être parce que, tapie dans l’ombre des murs, une reine des « Vampires », branchée saphisme, attend de pouvoir se nourrir… Premier volet d’une série comprenant La Vampire nue, Le frisson des vampires et Requiem pour un vampire, ce film ne laisse pas indifférent. On est en droit de préférer d’autres films de Jean Rollin (il réalisera par la suite La Morte Vivante et Lèvres de sang qui demeureront à tout jamais comme ses chefs-d’œuvre). Cependant, Le Viol du Vampire est une oeuvre fétichiste assez attachante qui regroupe pratiquement toutes les obsessions récurrentes du cinéaste (les influences gothiques, le thème de l’addiction vampirique, une « reine des vampires » toute nue…).