SYNOPSIS : « Kids,
mon premier film, parlait du monde secret des enfants, ce monde
interdit aux parents. Dans Ken Park, nous pénétrons dans
l’intimité de quatre familles et cette fois-ci, nous rencontrons
les parents. L’histoire se déroule à Visalia, une petite ville
de Californie isolée dans les terres entre Los Angeles et fresno.
Le film met en scène la vie de trois jeunes garçons et d’une
adolescente, tous amis d’enfants, et de leurs parents. Leurs
vies sont présentées sans fard, pour mettre en évidence la montée
de la violence, le sexe, la haine, l’amour, et les dérapages
émotionnels qui confinent à la folie. » Larry Clark |
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LE CORPS DANS KEN PARK
Larry Clark, on le sait, a toujours été
fasciné par les corps adolescents. Cette fascination s’exprime
pleinement dès ses premières photographies, jusque dans son
dernier film ; elle est l’une des sources les plus riches
et intarissables de son œuvre. Certains l’admirent pour cela,
d’autre le contestent. Tulsa, son premier recueil de
photos, réunissait déjà des clichés particulièrement crus
de corps livrés à la drogue ou à la misère. Ken park
est également parcouru par d’innombrables corps, mais ces
derniers, loin d’être passifs et usés, se découvrent être
le foyer d’une résistance aussi belle qu’inattendue.
Photographié ou filmé, le corps adolescent
tel que Clark le conçoit n’est pas nécessairement un organisme
qui change ou grandit. Il est d’une part un résultat (celui
d’un milieu) et d’autre part une envie. L’auteur de Kids
filme ainsi la tension entre ce dont l’adolescent hérite et
ce qu’il désire. Mais dans Ken Park, le désir n’est
pas désir de réussite, ni d’échapper à une éventuelle condamnation
future (condamnation par l’héritage social) : il est
avant tout désir sexuel. Par ce désir (qu’il ne manque pas
de satisfaire), l’adolescent transgresse les lois sociales
(Shawn couche avec la mère de sa copine), nie la religion
de ses parents (Peaches s’apprête à coucher avec son copain
quand son père ultra-catholique la prend sur le fait) et explore
les limites de son propre plaisir (Tate expérimente l’asphyxie
autoérotique). Le sexe devient le prisme sous lequel l’adolescent
définit ses rapports avec le monde et avec lui-même. Il est
l’unique moyen qui permette de s’écarter des institutions
(celles de la famille ou de l’école) et de maximiser son plaisir.
Le corps, à travers lui, assume le nihilisme pour poursuivre
à tout prix la jouissance.
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