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Alain Resnais (c) D.R. ALAIN RESNAIS
Le voyage dans l’autre temps
Par Clément GRAMINIES


Auteur de dix-huit films en cinquante ans, Alain Resnais crée l’événement à chacune de ses rares réalisations. Habité depuis quelques années par le même groupe d’acteurs, l’univers du réalisateur est devenu une marque de fabrique, clairement identifiable mais au demeurant assez mystérieuse dont Mélo pourrait être le meilleur exemple. Portrait et analyse.


  Pas sur la bouche (c) D.R.

Pas sur la bouche, dix-neuvième film d’Alain Resnais, sort sur les écrans le 3 décembre 2003. A voir la bande-annonce, on est rapidement tenté de faire un parallèle hâtif avec son précédent film, On connaît la chanson, co-écrit avec Agnès Jaoui et Jean-Pierre Bacri. Pourtant, Alain Resnais n’a pas toujours été ce réalisateur capable de rassembler le public et les critiques autour d’une œuvre légère et néanmoins réjouissante. En effet, celui qu’on a, à tort, assimilé à l’émergence de la Nouvelle Vague en 1959, n’a pas misé sur la quantité de ses réalisations mais sur la constance d’une qualité restée inégalée et qui révèle l’exigence d’un metteur en scène unique et inclassable.

 En 1955, lorsque sort le film documentaire Nuit et brouillard, la critique est en émoi, déstabilisée, et les Cahiers du Cinéma, perplexes, sont incapables de se positionner autour d’une œuvre qu’ils hésitent encore à classer comme novatrice et avant-gardiste. Pourtant, le temps aura su leur donner raison car Alain Resnais est un réalisateur à part entière, capable d’exceller dans une multitude de genres, adoptant tour à tour le classicisme, la théâtralité, la comédie musicale, le fantastique. Mais à bien y regarder, la quasi-totalité de ces œuvres éclectiques se rejoignent autour d’un même thème, celui du travail du temps sur la mémoire ou inversement, et cette récurrence n’est jamais exempt d’un humanisme notable, d’une résonance politique qui l’isolera définitivement de la Nouvelle Vague, exception faite de Jean-Luc Godard. Cette soif d’introspection de l’individu et cette quête d’une vérité perdue lui vaudront le reproche d’une cérébralité trop affirmée qui serait alors incompatible avec le genre cinématographique. Pourtant, Alain Renais n’exclut personne de son art visionnaire, encore moins le spectateur qu’il s’attache surtout à provoquer dans ce qui le rebute ou l’ennuie.