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Vivre ! (c) D.R. VIVRE !
de Zhang Yimou
Par Frédéric VERELST


SYNOPSIS : Des années 40 au lendemain de la Révolution culturelle, Vivre ! revisite quarante ans d'histoire de la Chine à travers les destins de Fugui et de sa femme, Jiazhen.

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L’ESPOIR COMME ULTIME RECOURS

  Zhang Yimou (c) D.R.

Zhang Yimou est retenu malgré lui en Chine parce que son film n'a pas encore reçu son visa d'exploitation de la censure ! L'histoire se passe pendant le Festival de Cannes en 1994 : son film, Vivre ! y est présenté en compétition officielle mais le cinéaste ne peut assister à la projection tant que le film ne bénéficie pas de cette autorisation officielle accordée par le régime de Pékin. Le cas n'est pas isolé et illustre bien la situation dans laquelle se trouvent les réalisateurs chinois qui doivent faire face à une main mise permanente exercée par la censure aux différentes étapes de la conception de projets cinématographiques (financement, distribution, etc.).

Réalisateur emblématique de la « cinquième génération », Zhang Yimou est, avec Chen Kaige, le fer de lance du nouveau cinéma chinois, issu de la Révolution culturelle. Même si ses films connaissent actuellement un certain succès à l'étranger, le cinéaste n'est toutefois pas totalement accepté dans son pays. Il doit subir les critiques conjointes de l' « intelligentsia » chinoise et des autorités de Pékin qui lui reprochent de mettre en scène des projets davantage axés sur l'Occident. Avec Vivre !, il dresse le portrait d'une famille chinoise balayée par le malheur à travers quarante ans d'Histoire de la Chine, de la période nationaliste à l'avènement de Mao, en passant par la Révolution culturelle et la période du « grand bond en avant ». A l'instar de Fassbinder, Zhang revisite l'Histoire de son pays, non pas en amont mais en aval. Vivre ! constitue davantage un mélodrame familial qu'un simple film historique. On y retrouve, en effet, tous les ingrédients du genre : fatalité, drame, musique empathique, etc. Aux héros ou aux victimes de la guerre, il préfère l'option de la quotidienneté. L'Histoire, présente en arrière-fond dans le récit, s'efface alors au profit des personnages. Ceux-ci ne seraient ni des victimes (au sens passif du terme), ni des entités historiques mais des héros anonymes, des témoins du changement de régime qu'a connu le pays. Zhang ne porte aucune forme de jugement vis-à-vis de ses personnages et n'éprouve pas non plus de pitié à leur égard. C'est au spectateur qu'incombera cette tâche. Si, en chinois, « huozhe » possède la double signification de vivre et de survivre, ce terme s'applique aussi bien aux millions de Chinois qui ont dû « survivre » pendant près d'un demi-siècle pour éviter de s'attirer les foudres du régime maoïste qu'à la famille de Fugui. Accompagné de sa femme, Jiazhen, celui-ci traversera les époques et connaîtra tour à tour les désillusions de la faillite, de la guerre et le drame de perdre ses enfants. C'est là que le verbe chinois prend tout son sens. Malgré ses malheurs, le couple continuera à garder espoir en la vie et en l'avenir. L'usage du point d'exclamation dans la traduction française du titre indiquerait non seulement un ordre, un souhait, mais il représenterait également un exemple pour les nouvelles générations. Le message, suggéré par l'isotopie du titre, aurait davantage une portée universelle que proprement chinoise. La dernière réplique du film illustre parfaitement cet élan optimisme : « la vie sera de plus en plus belle ». Elle consacre le triomphe des valeurs humaines, individuelles sur les sentiments collectivistes prônés par le régime communiste.