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Salo ou les 120 journées de Sodome (c) D.R. SALO OU LES 120
JOURNEES DE SODOME

de Pier Paolo Pasolini
Par Violaine GIRARD et Saad CHAKALI
Lyon, le 14 juillet 2002

SYNOPSIS : Au temps de la République fasciste de Mussolini, entre 1943 et 1945, quelques détenteurs du pouvoir, un duc, un évêque, un juge et un banquier mettent en scène dans un château Les cent vingt journées de Sodome du Marquis de Sade.


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Retour sur Salò ou les 120 journées de Sodome de Pier Paolo Pasolini édité en DVD par Carlotta Films.


CE LIEU SANS LIMITES


« (…) ce sont les destinataires de bonne foi qui acceptent de jouer. Ceux qui sont de mauvaise foi font « leur » jeu, autrement dit, on le sait, ne savent pas jouer. Le fascisme est un comportement triste et joué d’avance »
Pier Paolo Pasolini, Ecrits sur le cinéma, Petite Bibliothèque des Cahiers du Cinéma


  Salo ou les 120 journées de Sodome (c) D.R.
L’horreur est aussi l’affaire des poètes, des pendus de François Villon aux Fleurs du Mal de Charles Baudelaire, du poison exhalé des Chants de Maldoror de Lautréamont à l’extase mortelle de Jean Cocteau dans le Testament d’Orphée (1963), lâchant dans un râle mêlant jouissance et agonie  : « quelle horreur, quelle horreur ». Et l’horreur qui est à l’œuvre dans Salò, soleil noir de l’œuvre pasolinienne - son point aveugle -, œuvre au noir inscrivant au fer blanc la chair même de toute conscience spectatorielle (c’est déjà le générique, fond jaune bile, lettres rouge brun tel du sang caillé, ses couleurs organiques mortes et nauséeuses) d’un artiste qui n’a jamais caché sa passion pour l’alchimie (et les travaux de Carl Gustav Jung s’y consacrant), répond d’avance à la mort sordide du poète sur une plage d’Ostie la nuit du 1er au 02 novembre 1975, précédant de peu la sortie du film : « la mort opère une synthèse rapide de la vie écoulée et la lumière qu’elle projette rétroactivement sur cette vie discerne les moments saillants en les transformant en des actes mythiques ou moraux, qui se situent hors du temps » (1). L’assassinat du cinéaste comme dernier acte involontaire (du martyrologe pasolinien : la mort se doit avant tout d’être chez lui fulgurante et exemplaire), ultime bobine, addendum ou coda de Salò et donc d’une œuvre dont la force est de pouvoir s’approprier le réel même comme continuation de celle-ci, semble à la fois devoir conclure définitivement la chaîne mortifère établie dans le film, et à la fois signifier à quel point Pasolini appartenait, affectivement comme politiquement, au groupe des victimes représentées dans son film, mortes comme lui est mort : « …comme un chien » selon les ultimes paroles de Joseph K dans Le Procès de Franz Kafka.