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Gerry (c) D.R; GERRY
de Gus Van Sant
Par Matthieu CHEREAU

SYNOPSIS : Deux hommes, nommés tous deux Gerry, traversent en voiture le désert californien vers une destination qui n'est connue que d'eux seuls. Persuadés d'atteindre bientôt leur but, les deux amis décident de terminer leur périple à pied. Mais Gerry et Gerry ne trouvent pas ce qu'ils sont venus chercher ; ils ne sont même plus capables de retrouver l'emplacement de leur voiture. C'est donc sans eau et sans nourriture qu'ils vont s'enfoncer plus profondément encore dans la brûlante Vallée de la Mort. Leur amitié sera mise à rude épreuve.

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ANALYSE

  Gerry (c) D.R;

Écrire sur Gerry est facile. C’est un film remarquablement ouvert, dans lequel les répliques se comptent sur les doigts d’une main. Ouvert, il l’est au sens spatial du terme puisqu’il se déroule exclusivement dans un espace où l’homme est la plupart du temps éclipsé ou absent. Il l’est également au sens sémantique, puisque rien n’est dit ni sous-entendu, et que le sens y est à la fois omniprésent et impalpable.

Écrire sur Gerry est difficile. Parce qu’après Elephant, tout le monde va se s’emparer du film et ne pas tarir d’éloges - fondés ou non, sur lui. Parce que le seul fait que son réalisateur ait obtenu une palme d’or, légitime tous les superlatifs alors que ce film – bien que plastiquement superbe - n’entretient que peu de rapports avec celui qui lui succède directement (dans la filmographie de Gus Van Sant). Les superlatifs desservent la critique plus souvent qu’ils ne la servent.

Gus Van Sant (c) D.R;

Écrire sur Gerry devrait n’être ni facile, ni difficile. Cela devrait être une expérience (NB, ceci est une piste, pas un programme). À l’expérience du cinéma devrait correspondre l’expérience d’une écriture. Cela n’implique absolument pas que l’écriture devienne elle-même expérimentale, mais qu’elle accepte – pour mieux adhérer à son objet – de repousser ses propres limites, d’oublier des critères qui sont généralement ceux du cinéma classique (tels qu’il sont définis par l’industrie), par rapport auxquels Gus Van Sant a précisément tenté d’entrer en rupture.

Écrire sur Gerry est une expérience nécessaire donc, parce que ce film oblige à parler d’un rapport à l’espace, au temps, au corps des acteurs, redécouvert par le cinéma moderne. Ce rapport n’est pas réglé, c’est un rapport de questionnement. Il interroge : quelle échelle, quelle durée, quel corps ?