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Struggle (c) D.R. STRUGGLES
de Ruth Mader
Par Philippe CHAPUIS


SYNOPSIS : La lutte pour l'existence, lutte pour la subsistance, lutte pour la survie. Lutte dans le monde du travail : dans des champs de fraises, dans des usines, dans des bureaux, dans des voitures, dans les rues. Une cueilleuse de fraises d'Europe de l'est qui se bat pour une vie meilleure pour elle et sa fille et un agent immobilier viennois.

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EN SOUFFRANCE

Projet

  Struggle (c) D.R.
Si l’on excepte le prologue montrant la révolte d’une vieille femme alitée qui refuse le regard faussement compatissant des médecins, Struggle procède de deux mouvements successifs et finalement conjoints : le premier s’attache à montrer le parcours ou plutôt la trajectoire d’Ewa, jeune travailleuse polonaise précarisée qui enchaîne les tâches pénibles et temporaires en Autriche : cueillette des fraises, abattage de poulets à la chaîne, astiquage de divers bibelots, ménage à domicile jusqu’à ce qu’elle échappe (de peu) à une rafle policière de travailleurs clandestins. On abandonne alors Eva, en pleurs, au milieu d’un champs. Un homme seul (Marold) au volant de sa grosse voiture lancée sur l’autoroute chantonne en écoutant la radio. Il visite des immeubles déserts et lugubres, immenses et vides. Il est l’agent immobilier de ce vide envahissant. Le soir, il rentre chez lui, dans le couloir qui mène à sa porte, des dizaines de portes identiques conduisant à des appartements tous semblables. Comme Ewa, il a une petite fille, mais elle ne vit pas avec lui - La loi l’oblige cependant à  voir régulièrement son père. Pour conjurer la triste absurdité de son existence, Marold se réfugie dans des fantasmes que l’on met à sa disposition et dont il veut repousser les limites - comme pour tenter, envers et contre tout, de se singulariser et même s’il doit, pour connaître le fugitif sentiment d’exister, regarder en face sa propre fin…

Dans le devenir de ses deux êtres et de leurs proches transparaît l’évocation d’une civilisation entière dont le naufrage imminent nous est annoncé par une improbable Cassandre. C’est là sans doute le cœur du projet de la jeune cinéaste autrichienne : nous mettre en face de la ruine d’un monde factice, notre monde, tombant sous les coups de pulsions mortifères qu’il génère sans jamais parvenir à les contrôler. C’est de cette détermination tranquille mais implacable de Ruth Mader que naît la grande force du film.