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Lost Highway (c) D.R.
Or donc, Arte a programmé le 24 octobre 2000 une soirée Thém@ intitulée Petites Révolutions Culturelles et consacrée à la montée en puissance des petites caméras dans l’industrie cinématographique mondiale. Encore relativement réservées à des tournages amateurs il y a peu, la caméra DV gagne petit à petit ses lettres de noblesse en même temps que progresse sa technologie : elle brise l’un après l’autre tous les préjugés qui lui collaient à la peau et voit s’élargir de jour en jour son terrain d’application. Non plus seulement adaptée à des projets qui nécessitent légèreté et rapidité d’exécution, la caméra numérique est passée en quelques années du statut méprisé de camescope amélioré à celui de nouvel outil révolutionnaire. Nous ne débattrons pas ici longuement des transformations qu’un tel procédé peut effectivement provoquer dans le monde du cinéma, même si l’on pressent déjà qu’une nouvelle Querelle des Anciens et des Modernes est en train de naître, mais force est de constater que la caméra DV fascine et remet en question un grand nombre de réalisateurs, toujours plus nombreux semaine après semaine à rejoindre les rangs de ceux qui ont passé le cap de la première fois numérique. Les exemples célèbres ne rempliraient pas encore un dictionnaire spécialisé, mais tout le monde a probablement eu vent de la fameuse anecdote des cent caméras utilisées par Lars Von Trier sur le tournage de Dancer in the Dark (le profond intérêt visuel est probablement discutable, mais l’effet médiatique et publicitaire indéniable). Nous pourrions également évoquer l’heureuse idée qu’avait eue Arte au début 2000 d’initier une série de téléfilms tournés en DV, regroupés sous le titre générique Petites Caméras et réalisés par des metteurs en scène français de renom, notamment Claude Miller, qui avait tourné La Chambre des Magiciennes, enthousiaste face à cette nouvelle technique qu’il découvrait. Ainsi donc, les plus irréductibles des metteurs en scène formés à l’ancienne école comme les jeunes loups du cinéma, dogmés ou pas, veulent tâter à leur tour de ce tout nouveau jouet, qui paraît devoir demeurer sur les étalages (et dans les conversations) un peu plus qu’une saison, n’en déplaise aux mauvais esprits.

" Microcinéma ", le premier documentaire de cette soirée Théma, réalisé par Nicolas Saada, critique aux Cahiers du Cinéma, se propose ainsi de dresser un état des lieux de l’évolution de la DV à la fois dans les esprits et dans les faits. A travers une série d’interviews, nous suivons les commentaires de réalisateurs ou de directeurs de la photographie pris en flagrant délit de tournage DV sur un plateau quelconque et qui nous confient tour à tour leur scepticisme modéré ou, plus souvent, leur engouement passionné pour ce nouvel outil. " Microcinéma " évoque également les espoirs et les attentes qu’engendre l’essor d’Internet, notamment au sujet de la distribution et de la diffusion des films, abordant là une ère du cinéma dont nous ne connaissons probablement que les premiers balbutiements actuellement.

  Lost Highway (c) D.R.
Etriqué et coincé entre ce reportage et un autre intitulé Révolution Homestudio (consacré à la musique électronique), David disposait d’une dizaine de minutes (en fait, 8’30’’ simplement !) pour nous livrer ses propres réflexions sur l’émergence de cette technologie. Cette interview, également menée par Nicolas Saada, était un peu pompeusement appelée " documentaire ", ce qui paraît plus qu’excessif pour un sujet d’une part aussi court et d’autre part dépourvu de réelle ambition de mise en scène, puisque David, du début à la fin de l’entretien, ne quitte pas un instant son fauteuil, se contentant de répondre aux questions qui lui sont posées (hors champ caméra) et qui ont par la suite été classées selon un certain nombre de thèmes. Grâce au ciel cependant, on nous a pour une fois épargné les habituels commentaires d’introduction sur sa chemise soigneusement et élégamment boutonnée jusqu’au col, sur son apparence et son attitude aux antipodes de l’image de savant fou ou de gourou souvent véhiculée par les médias, etc., autant de clichés qui auraient pu transformer cet entretien en véritable peau de chagrin dérisoire et inintéressante.

Retrouver David à l’écran me procure toujours une impression étrange que je ne saurais précisément définir, mais qui ne se limite plus au plaisir que j’avais à le revoir avant de le connaître. Je pourrais avoir recours à la formule galvaudée d’avoir vécu " comme dans un rêve ", me demandant toujours et encore si je l’ai bien rencontré et où se sont enfuis ces éphémères moments que j’ai partagés en sa compagnie, mais non, cela ne suffirait pas à exprimer la singulière sensation qui me traverse lorsqu’il est là, face à moi sur l’écran. Il est alors pourtant visible par des milliers de spectateurs, mais certains de ses gestes, de ses intonations, de ses attitudes, de ses regards, me sont si familiers à présent que je me sens finalement en état de parfaite réceptivité avec lui, qu’il n’existe plus de parasites pour me détourner de l’essentiel. Mais coupons là, avant que l’on ne me considère comme la forme la plus pure du mythomane lynchien !