Le propre des rencontres internationales de cinéma est de proposer un panorama aussi riche que diversifié, et cette année fut exemplaire : tous les continents furent au rendez-vous de cette manifestation artistique qui sait se montrer chaleureuse et intelligente. Pour preuve, l'intégrité indéniable des films présentés entre le 25 octobre et le 5 novembre.

Ainsi Le Cercle : Jafar Panahi, qui a reçu le Lion d'Or à Venise, nous entraîne dans les circonvolutions effrénées de la plus vicieuse forme circulaire existant dans la réalité : le pouvoir abusif des hommes sur les femmes, notamment en Iran. Cercle vicieux en effet, car sans échappatoire pour les quelques héroïnes traversant l'écran, cachée derrière la peur de leur tchador, ou le courage de leurs regards défiant le monde, celui des hommes. Passant d'un personnage féminin à un autre avec une fluidité scénaristique et visuelle, Panahi montre plus qu'il ne démontre. Aucune leçon ici, hormis celle de la réalité extérieure au film qui a nourri la fiction présentée à nos yeux d'Occidentaux effarés face à une telle histoire, qui se répète maladivement d'une génération de femme à une autre, tout cela dans la caméra d'un homme qui dans un même élan réussit à faire parler la réalité de son pays à travers la bouche d'une fiction : car mise en scène il y a, dans la sobriété esthétique d'un plan fixe par exemple, quand l'une des dernières femmes du film se fait ramener en voiture sans oser regarder le conducteur - l'homme - tout est dit mais pas forcément montré. La suggestion prend alors le dessus, et faire du cinéma avec les images d'à côté, avec ce qui n'est pas vu, ce qui reste hors-champ, relève souvent de la virtuosité, ou de l'effort narratif tout simplement : quand l'homme apparaît, et que son identité nous foudroie autant que le personnage féminin, les minutes précédentes se rengorgent d'un fluide crépitant comme en un système de vases communicants provoquant une réaction dans notre esprit, la colère, peut-être, l'indignation, en tout cas. Ce fluide, c'est le talent.