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Le meilleur pour la fin : je veux parler
de En Construcción de l’Espagnol José Luis Guerin,
de loin le film le plus intéressant de la sélection selon
moi. Guerin a conçu son film comme un work in progress.
Pas d’intrigue mais l’évocation, à travers les portraits entrecroisés
de quelques personnages, de la rénovation du quartier populaire
de Barrio Chino à Barcelone, entre construction de nouveaux
bâtiments et destruction d’anciens. On n’est pas surpris d’apprendre
que ce cinéaste a commencé par le cinéma expérimental, car
il y a chez lui une véritable réflexion (quasi politique)
sur la forme, et son adéquation au sujet. Ce qui est remarquable,
c’est que le film, narrant l’évolution d’un chantier, adopte
lui-même la forme d’un chantier, comme pour donner une juste
traduction cinématographique de « la forme d’une ville ».
Ce, grâce à un dispositif cinématographique, ouvert et vivant,
qui accueille le réel. Ainsi la ville se construit au fur
et à mesure que le film lui-même se fait. Le titre désigne
aussi bien la ville que le film,ou, en d’autres termes, la
ville comme fond et forme du film. On pense à ce que disait
Godard dans les années soixante. Un dernier mot : En Construcción
est parcouru par une profonde obsession de la mort, donnant
au film une charge mélancolique et métaphysique. Ainsi la
ville est faite autant de morts que de vivants et elle est
elle même un processus permanent de mort et de renaissance.
Plus encore, la ville s’édifie sur la mort. Les premiers coups
de pelles du chantier permettent la découverte de squelettes
datant de l’Antiquité. Par ailleurs, tout au long du film,
les personnages ne cessent de parler de thèmes comme la solitude,
la fragilité et l’absurdité de la vie, la mort.
En tout cas, il n’est pas difficile de sentir la sympathie
du réalisateur pour ce quartier (et bien sûr les gens qui
l’habitent) qu’on veut détruire au nom d’une certaine modernité
axée sur le développement et le profit. J’ai noté que le réalisateur,
pendant le débat suivant la projection, avait dans la poche
un exemplaire des Lettres luthériennes de Pasolini,
livre qui évoque la transformation d’un monde et même de villes
(Bologne) sous l’effet ravageur de la société de consommation.
Et l’on retrouve là l’un des enjeux politiques de ce festival.
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Le Grand Prix du Public
s’est porté sur un documentaire : Promises,
de Justine Shapiro, B. Z. Goldberg et Carlos Bolado,
film consacré au conflit du Proche-Orient vu par
des enfants palestiniens et israéliens. Ce film
a donc été doté de la somme de 100 000 F offert
à son futur distributeur (grâce aux Rencontres,
la distribution française est en cours de négociations)
et de 20 000 F offerts aux réalisateurs par la
Fondation Gan pour le cinéma.
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