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Festival Internationale du film de Belfort (c) D.R. FESTIVAL INTERNATIONAL
DU FILM DE BELFORT


EntreVues
Edition 2001
Par Philippe BEER-GABEL
et Nicolas CHEMIN


Bien que les températures n’incitaient pas à sortir le bout du nez dehors, la seizième édition du festival de Belfort, une fois n’est pas coutume parée d’une sélection riche et éclectique, a brassé du monde et du beau monde. Rompant avec la monotonie et le caractère impersonnel de nombreux festivals, professionnels et festivaliers pouvaient donner libre cours à leurs fantaisies et pulsions diverses à la Poudrière, boîte locale, ainsi que sous le chapiteau prévu à cet effet. Après une rapide reconnaissance des lieux, s’engageait alors une course contre la montre pour voir les quelques films projetés dans les salles du cinéma Alpha durant nos trois jours sur place.


LES COURTS

  Hautes Herbes (c) D.R.
Freunde (22 minutes, couleurs, 35 mm, 2001), œuvre du cinéaste allemand Jan H.Kruger conte par épisodes, avec une chronologie elliptique pour seule loi narrative, une romance libertine homosexuelle entre deux adolescents. L'espace-temps ainsi disloqué, la mise en scène se libère de toute implication éthique pour ne recueillir que des éclats de matière, des ballets de corps, des jets de substance. Un manifeste à la gloire de la sensation et donc de l'esthétique, qui promène son insouciance sur une crête étroite, entre grâce et vanité. Ce même jeu d'équilibriste est pratiqué par le second court de la série.

Matthieu Gérault se penche cependant trop, malheureusement, vers le précipice abrupt qu'il a lui-même creusé, à pratiquer toujours plus l'escalade esthétique. Hautes herbes (26 minutes, 35 mm, 2001) est d’une beauté glaciale et peine à prendre chair. Son élégant noir et blanc vire au métallique, et si la veine du cinéaste est identifiable au premier coup d’œil, entre Bresson et Dreyer, c'est à dire entre Ramos et Odoul, sa variation peine à s'incarner au-delà des images, des gestes ou de la nature. Une situation primitive originale, prétexte à engrenage, mais qui ne distille rien d'autre qu'une mosaïque trop parfaite et contre-signifiante. Gérault a inventé le cinéma conceptuel.

Le troisième et dernier film de cette soirée s'avère plus long (45 minutes) et plus intéressant que les précédents. L'Arpenteur (Couleurs, 35 mm, 2001), de Sarah Petit et Michel Klein, promène un objectif avide d'oxygène sur des paysages arméniens vierges. Un arpenteur et son assistant, personnage-relais, sont chargés de repérer le traçage d'une route à travers ces montagnes...

Calendar (c) D.R.
La fiction est embrayée depuis la France : un jeune français d'origine arménienne est renvoyé au pays, parce qu'il déçoit sa famille. Il y retrouve son oncle, arpenteur, pour l'assister dans sa tâche. L'exil est ici abordé sur la même voie de découverte que dans le Calendar d'Egoyan. Avec lui, le français apporte la civilisation (la route). A mi-parcours, la découverte des terres ne suffit plus : les racines sont plus importantes. Et le héros de quitter son oncle, qu'il déçoit à son tour (l'arpenteur est la civilisation), et de partir en quête de son plus vieil aïeul. Adjuvant mystique (sobrement nommé, dans le générique, l'Ange d'Erevan), une jeune fille l'aide dans sa tâche. Fausse piste, réorientation, etc. Le récit initiatique aboutit, enfin, à la quiétude d'un vieil arménien paisible, hors du temps et de sa marche. Si la structure narrative, ainsi décrite, paraît squelettique et banale, son habillage possède une fraîcheur touristique et une portée thématique qui donnent sa qualité au film. A la différence des auteurs de Freunde et de Hautes Herbes, Sarah Petit et Michel Klein ont pris soin d'écrire au dos de leur carte postale...