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Quinzaine des réalisateurs (c) D.R. LE CINEMA
DANS TOUS SES ETATS

Cannes 2002
Quinzaine des réalisateurs
Par Yves GAILLARD


Que vous inspire l’idée que la mondialisation met en péril la diversité cinématographique ? "


  Pedro Costa (c) D.R.

La question a de nouveau été posée en 2002 par la Société des Réalisateurs de Films (en partenariat avec Les Cahiers du Cinéma, Le Festival des 3 Continents, et la maison de production documentaire Les Films d’Ici) à des cinéastes du monde entier. À charge pour eux d’y répondre par un film d’une durée de quelques minutes, auto-produit, et dans la forme souhaitée par le réalisateur. Les dix cinéastes ayant répondu à l’appel ont donc présenté leurs travaux lors d’une séance spéciale, dans le cadre de la Quinzaine des Réalisateurs à Cannes.

Le caractère ouvert de la question constituait un appel à une liberté d’invention, en dehors de toute catégorisation esthétique. En s’adressant à des cinéastes inscrivant leur travail tant dans la fiction que le documentaire, le projet s’offrait comme le champ d’expériences singulières, augmenté de l’exigence d’une forme courte (les films ne dépassent pas la quinzaine de minutes).

Ainsi Global Coverage, où la cinéaste palestinienne Leila Sansour choisit la méthode du documentaire auto-filmé pour mobiliser autour de la souffrance palestinienne, des " stars ", sélectionnées selon leur potentiel spectaculaire. Dans les modalités d’écriture documentaire les plus contemporaines, le dispositif d’auto-filmage constitue une forme en vogue, même si son côté " recette " place la mise en avant du dispositif au détriment du sujet traité. Ici, l’acte individuel, perçu comme dérisoire, porte en lui son propre échec. En suivant les règles du jeu médiatiques, et ce, jusque dans la forme du film, télévisuelle et banale, Global Coverage reconduit un sentiment d’impuissance face à l’écho du monde transmis par les médias. Le dérisoire est contagieux, et le film ne dépasse pas l’anecdote.

Waltrer Salles (c) D.R.

Après les médias, l’omniprésence du cinéma hollywoodien est, bien entendu, un thème récurrent pour des cinéastes confrontés quotidiennement à l’homogénéisation des images. Au point que la relation avec " l’Empire " s’apparente à une actualisation du mythe faustien, où L’Appel d’Hollywood, (comme se titre la comédie de Manu Rewal) enclôt l’engagement artistique possible dans la nécessité de trancher, d’abord, la tentation de l’intégration dans le Grand Tout mondialiste. Donner à voir le conflit entre globalisation et singulier passe nécessairement par cette reconnaissance de l’intériorité du conflit. L’Appel d’Hollywood, dans une forme de sitcom, relègue donc hors champ ce qui fait signe d’altérité pour le spectateur occidental, pour décrire le dilemme d’une jeune actrice indienne confrontée à la proposition téléphonique d’un producteur américain. C’est dès lors dans une quasi-schizophrénie permanente que L’Appel d’Hollywood sursaute au gré des coups de fil, inconstances et dénis de son héroïne. Plus que son choix final (rester, ou partir), c’est dans la reconnaissance du mouvement d’oscillation entre deux identités, jusque dans le dérisoire – sari ou mini-jupes ? - que le film élabore son propos.