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Etats généraux de Lussas 2002 () D.R. ETATS GENERAUX
DE LUSSAS 2002

Introduction
Par Yves GAILLARD
Photos de Safia BENHAIM


Fondés en 1989 à l’initiative de l’association Ardèche Images, les Etats Généraux du Film Documentaire se sont imposés au fil des ans comme un rendez-vous incontournable pour la chaîne de production documentaire (auteurs, producteurs, diffuseur), mais aussi pour l’amateur : universitaires, étudiants, critiques.   Élaborés comme une université d’été autour du documentaire de création ( " C’est bien le cinéma en premier lieu qui nous mobilise et que nous aimerions convoquer ; tout en explorant ce qui aurait " valeur documentaire "), Les Etats Généraux constitue chaque année l’achèvement, et le renouveau des activités développées par l’association Ardèche Images.


  Lussas devant bioscope (c) Safia Benhaim

La petite commune de Lussas est ainsi devenue l’épicentre d’un faisceau de structures dévouées au cinéma documentaire comme la Maison du Doc’ (centre de ressources du documentaire d’Europe francophone réunissant bibliothèque, vidéothèque, archives), ou encore le développement d’activités de formation. " La nécessité de s’investir dans la formation relève de l’engagement ", comme l’annonce la brochure d’activités. Cette volonté didactique s’exerce exemplairement par la mise en place d’un DESS "Réalisation de Documentaire de Création " en partenariat avec l’Université Stendhal de Grenoble. Les travaux issus de cette formation furent ainsi présentés en Ouverture, et au cours de séances spéciales. Que tout cela prenne place dans un village ardéchois, à peine desservi par le bus, relève d’une utopie réalisée…

Cette 14e édition, dans ses thématiques et ses rétrospectives, donna à penser la nécessité dans laquelle se situe aujourd’hui le documentaire, et le cinéma en général, d’inventer de nouvelles démarches formelles coûte que coûte, afin de poursuivre une réflexion sur la nature des images dont l’inflation tend à se substituer complètement au " réel ". C’est en tout cas l’impression dessinée par une programmation qui s’orienta globalement vers l’ouverture à des expériences filmiques volontiers marginales, offertes au regard comme autant de prototypes (la sélection  Expérience des Limites,  entre-Deux)., et dans le défrichement d’une " poétique documentaire " par l’universitaire François Niney. Mais aussi en offrant aux regards des démarches documentées élaborées au sein d’un système contraignant, telle la télévision publique (Way of Seeing de John Berger et Michael Dibb, 1972, réalisé pour la BBC, hommage à Kevin Brownlow), ou, toute proportion gardée dans la comparaison bien sûr, dans la censure permanente exercée par un état totalitaire (hommage à Thomas Heise, réalisateur de l’ex-RDA). La justesse de ton et la lucidité critique offerte par l’expérience des marges (esthétiques et économiques) rejoignit ainsi le travail entrepris " de l’intérieur ", et dont Tomas Heise constitue une sorte de parangon (plus d’une dizaine de ses films furent détruits par la censure d’état).

Lussas - Journal Hors Champs (c) Safia Benhaim

On pourra s’étonner de cet horizon d’analyse portant sur des questionnements esthétiques, alors que les bouleversements historiques survenus en 2002 appelaient à priori à des questionnements plus en phase avec l’actualité. Mais c’est précisément dans la démarche réflexive entamée sur son objet que les Etats Généraux définissent les enjeux à venir pour le cinéma documentaire : non plus tant interroger le réel au nom de présupposés idéologiques et esthétiques tout aussi contestables que les mécanismes qu’il entend travailler, mais s’interroger sur les formes mêmes d’un discours, et en particuliers d’un discours de résistance.