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Cette rétrospective
fait suite aux rebondissements récents du " feuilleton
Shaw Brothers ". Cette compagnie mythique,
dont les droits d’exploitation des films étaient bloqués
depuis plus de trente ans, fut la productrice des plus grands
du cinéma hong kongais classique, de King Hu à
Liu Chia Liang en passant par Ho Meng Hua ou Chang Cheh. Dès
lors, la décision inespérée du vénérable
tycoon Run Run Shaw de mettre aux enchères une partie
du catalogue de sa compagnie en vue d’une édition DVD,
clôtura une attente qui semblait devenue vaine après
tant d’années. Ce catalogue, acquis majoritairement
par la compagnie hong kongaise Celestial Pictures, et dont
le contenu exact et les modalités (uniquement
vidéo et dvd, droits TV, salle ?) restent encore
flous, s’annonce cependant comme représentatif de la
richesse d’une production qui effeuilla tous les genres, du
mélodrame au kung-fu. À noter que Celestial
Pictures lance d’autre part une politique de restauration
de prestige, avec par exemple Come drink with me, ou
Blood Brothers de Chang Cheh, ce dernier étant
présenté pour la première fois en France
à la Cinémathèque.
Cette cession de droits constitue un événement
majeur dans le double rapport, marqué encore aujourd’hui
au sceau du conservatisme, qu’entretiennent les détenteurs
asiatiques à leur patrimoine cinématographique
et à sa diffusion sur les marchés mondiaux.
Et ce, malgré l’accession au titre de valeurs sûres
en Occident, des cinéastes comme Tsui Hark, ou de stars
comme Jet Li, la nouvelle coqueluche des vidéoclubs.
Tandis que la sortie DVD se fait encore attendre, et en deçà
d’une situation autant économique que politique en
pleine évolution, l’accession progressive au patrimoine
du cinéma hong kongais se traduit pour l’amateur par
la possibilité, jusque-là inespérée,
d’appréhender ce cinéma dans une perspective
historique, jusque-là rendue impossible par une distribution
(du moins en France) en pointillé.
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Organiser une rétrospective
du cinéma hong kongais " classique ",
période s’étendant de la fin des années
60 au milieu des années 70, c’est d’autre part confronter
à nouveau le public parisien à un genre qui
connut son heure de gloire dans les salles d’exploitation
il y a une trentaine d’années. Succédant au
western Italien, voisin du porno sur les devantures des cinémas
de quartier, le kung-fu et le Wu Xia Pian (c’est-à-dire
le " film de karaté " ainsi que
le nommait les bulletins des spectacles de l’époque)
constituèrent les derniers filons d’une exploitation
fondée sur un renouvellement constant des genres, avant
l’extinction de ce système au début des années
80. De l’été 1973 à décembre
2002, il aura fallu presque trente ans pour que La Rage
du Tigre passe du Rex et de l’Hollywood Boulevard à
la salle " Grands Boulevards " de la Cinémathèque,
et qu’après le cinéma de genre européen,
Hong Kong trouve officiellement sa place dans le patrimoine
cinématographique mondial. Espérons que cet
évènement ne restera pas solitaire, et que sa
dimension de prestige concourt un peu plus à la reconnaissance
de ce cinéma encore confidentiel, jusque-là
cantonné dans les réseaux de distribution parallèles.
Par son intitulé même ( " Chefs
d’œuvre du cinéma de Hong Kong "), cette
rétrospective ne s’offre pas comme une entreprise exhaustive,
visant à épuiser une cinématographie
considérée, à juste titre, comme une
mine d’or pour cinéphiles curieux. Une précaution
oratoire qui prévient d’emblée nombre de critiques.
Ainsi, privilégier Chang Cheh plutôt que le nihilisme
lucide d’un King Hu ou d’un Liu Chia Liang, c’est asseoir
le caractère subjectif du choix de ces chefs d’œuvres,
et opter ainsi pour une reconduction de l’image d’un cinéma
hong kongais plein de bruit et de fureur. Une image forgée
dans le nouage inextricable des parti pris de la critique
et des goûts volontiers versatiles du public d’amateurs
actifs.
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