28 janvier au 30 avril 2003
Maison de la culture du Japon
Paris
Par
Frank CARANETTI
Le cas du Japon est aujourd’hui
presque unique dans le panorama du cinéma mondial. Dés la
fin des années 60, le nombre de films produits par des compagnies
indépendantes dépassait celui des sorties des grands studios,
et le phénomène s’amplifie encore dans les années 2000 (1).
Ces résultats ne signifient pas toutefois une réelle bonne
santé du cinéma japonais. En effet, les majors limitent progressivement
le nombre de sorties sur grand écran et préfèrent - tout en
conservant le monopole des salles exploitées et le réseau
de distribution - réaliser d’importantes économies sur le
coût de production des films, la durée globale des tournages,
la plupart du temps sans grands enjeux artistiques, et réduire
leurs risques financiers alors que l’économie cinématographique
est le plus souvent en crise. La fréquentation des salles
diminue dangereusement jusqu’en 2001, le prix des places reste
quant à lui prohibitif -15 € en moyenne - tandis que, comme
l’écrit Max Tessier, l’intérêt des grands studios pour le
cinéma est ordinairement plus fonction de l’économie que d’une
véritable volonté artistique. La qualité des films, comme
le niveau de qualification des techniciens du cinéma, est
de manière générale bien moindre que dans la période de l’après-guerre.
Le cinéma des années 80
et 90 est par conséquent fréquemment considéré comme un cinéma
en déclin, ayant perdu ses derniers véritables auteurs - Ozu
disparu peu après Le Goût du Saké en 1963, Kurosawa
après Madadayo- au profit d’une progression
de l’amateurisme. Les metteurs en scène sont plus couramment
signés dans les chaînes de télévision nationales et la succession
des tournages finit par asphyxier tout éventuel épanouissement
ou investissement artistique de la part de l’auteur (2).
On s’étonnerait néanmoins à tort de la rétrospective - du
« panorama » - que consacre aujourd’hui la Maison
du Japon à ce cinéma des deux dernières décennies, elle qui
se distingue régulièrement par la tenue de sa programmation ;
récemment encore, celle-ci se penchait sur l’animation japonaise
des années 1920 à 1950, puis sur le cinéaste Tomu Uchida ,
tandis qu’elle accueillait, en décembre dernier, le poète
américain Gary Snyder. En confirmant un choix d’œuvres parfois
difficiles, la salle du Quai Branly assure une sélection tout
à fait pertinente, qui alterne aussi bien des films ouverts
à l’Occident, dont d’authentiques succès commerciaux, que
des œuvres qui n’ont pu trouver qu’un public restreint en
France ou en Europe. La « politique des Auteurs »
de la MCJP (Maison de la Culture du Japon, à Paris), qui réunit
aussi bien des œuvres de cinéastes reconnus que la nouvelle
génération d’auteurs, rend adroitement hommage au cinéma japonais
contemporain et au regain d’intérêt que celui-ci suscitait
de la part de la critique internationale.