MERCREDI 9 AVRIL
Il pleut sur la ville
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Réveil parisien difficile.
Pourtant, le train du festival ne quitte la Gare de Lyon qu’à
9 h 20. L’horaire de départ est donc plus que correct et manquer
le TGV à destination de Toulon avec arrêt exceptionnel en
gare de La Ciotat relèverait d’une flemmardise exceptionnelle
voire maladive. Mais il y a des matins comme cela où l’attraction
terrestre se fait plus forte. Comme si pendant la nuit le
corps assoupi s’était inséparablement soudé au matelas tentateur.
Et par une loi de la contradiction qui fait toute la saveur
de l’existence humaine, ce sont toujours les jours où le temps
est compté que l’horloge interne a dû mal à se mettre en route.
Finalement, au bout de quelques minutes d’efforts pathétiques,
la comateuse machine finit par retrouver son rythme quotidien.
Petit déjeuner rapide, douche express, valises saisies au
vol, escaliers descendus quatre à quatre, métro, changement
de ligne, de nouveau escaliers, de nouveau métro, puis escalators,
et enfin – délivrance – le hall de départ de la Gare
de Lyon, lieu ferroviaire qui par anticipation olfactive sent
si bon la lavande et le romarin.
A 9 h 10, le quai s’affiche. Voie C. Deux wagons de première
classe sont réservés aux festivaliers. Avant de pouvoir s’y
installer, l’attachée de presse Manon Ouellette remet aux
scénaristes, producteurs, acteurs, réalisateurs et journalistes
présents un sac de toile, au logo de la SACD (Société des
auteurs et compositeurs dramatiques), contenant le programme
des cinq jours à venir. Un kit du parfait festivalier avec
photos et mini-biographies qui s'avèrera particulièrement
utile durant le séjour à La Ciotat. Une fois détenteurs de
ce nécessaire du parfait festivalier, les invités montent
en une file indienne cahotante dans le train à grande vitesse.
Ils entassent leurs bagages dans les rangements prévus à cet
effet et s’assoient en fonction de leurs affinités électives
dans les traditionnels sièges rouge et gris qui composent
les compartiments des nantis du transport ferroviaire. Votre
narrateur ne connaît personne et s’installe donc où son instinct
le guide. Non pas dans une place isolée comme sa timidité
le lui conseille, mais dans une de ces paires de sièges qui
font le bonheur des voyageurs amoureux. Ce positionnement
stratégique devrait logiquement entraîner une première rencontre,
une première discussion. Ce qui fait l’intérêt de cette expédition
journalistique pour le 6e Festival des scénaristes de La Ciotat.
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Les minutes s’écoulent.
Soudain, une main se tend. “ La place est libre ? ”,
demande un individu au sourire avenant. “ Je m’appelle
Nadim Chammas. Et toi ? Ca te gêne si on se tutoie ? ”.
Le contact est franc, direct, chaleureux. Vendredi, ce trentenaire
libanais va présenter un scénario de long-métrage au Forum
des auteurs. Le Festival des scénaristes de La Ciotat propose
en effet à plusieurs auteurs débutants un premier contact
avec le public. Les apprentis scénaristes, ils sont au nombre
de huit pour cette sixième édition, disposent de vingt minutes
pour présenter leurs projets. Pendant vingt autres minutes,
ils doivent ensuite répondre aux questions de spectateurs
pour beaucoup professionnels. Dans cette démarche pas forcément
évidente, ils sont assistés par un scénariste confirmé et
un producteur expérimenté séduits lors des phases de sélection
précédentes par une histoire souvent au stade d’ébauche.
Pour Nadim Chammas, présenter un scénario est une grande première.
Il a bien participé à un autre festival quelques mois auparavant.
Mais rien à voir avec le Festival des scénaristes de La Ciotat.
Nadim est tout nouveau dans le métier. Il a seulement suivi
pendant quelques semaines un programme de formation à l’écriture
fictionnelle dirigée par Marie-Geneviève Ripeau, directrice
du département scénario de la Fémis. Mais “ Le Russe
est revenu ! ”, son premier scénario qu’il espère bien
réaliser lui-même, paraît déjà très maîtrisé. Du moins c’est
ce que les extraits communiqués par l’organisation semblent
indiquer. Une discussion passionnante s’engage alors sur la
situation politique actuelle au Liban, sur le positionnement
du gouvernement local vis-à-vis de la situation en Irak. Mais
aussi sur la capacité d’une communauté à panser les plaies
d’une guerre civile. Un thème qui sert de toile de fond à
ce retour d’exil mouvementé que raconte Nadim Chammas à travers
le personnage d’Adib.
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