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  Sonatine (c) D.R.

Les clans yakuzas, « parties intégrantes de la société japonaise qui existent depuis le XVIIe siècle, partageaient à l’origine leurs activités entre les jeux et le marché noir. Chaque membre accepte la hiérarchie et se soumet au groupe, l’individu étant prêt à sacrifier sa vie pour ce qu’il estime être son devoir ». Ce dernier est bien le pendant du gangster italo-américain, qu’il soit filmé par Suzuki ou Fukasaku. Chez Kitano il est  habillé par le couturier Yoshi Yamamoto, comme en écho au gangster scorsesien vêtu en Versace ; le yakusa, pour imposer le respect, roule toujours les « r ».  Kinji Fukasaku a été le premier réalisateur à se démarquer de l'image du bon yakusa guidé par l'honneur et la solidarité, pour imposer celle d'un gangster rongé par la trahison.

Chez Seijun Suzuki, il arrive qu’il évolue en dépit des règles instaurées, qu’il rompe les interdits du clan. Ainsi les deux frères de La vie d’un tatoué en arrivent à tuer un chef yakusa. Le cinéma de Suzuki s’ouvre sur une petite mélodie japonaise soutenue par des paroles surannées, où se heurtent l'univers enchanté de Jacques Demy et un cinéma nerveux rappelant celui de Samuel Fuller. Suzuki n’a mis en scène que des séries B au sens littéral, il n’a jamais choisi les scénarii de ces films ni la distribution, dont le faible budget est contrebalancé par une mise en scène inventive. Fukasaku et Suzuki sont adulés par Kitano, Tarantino et Jarmusch qui le citent abondamment.

Scarface (c) D.R.

Le yakusa kitanesque est l’archétype de l’anti-héros, froid, décidé et flegmatique. Dans Sonatine, Murakawa veut quitter les Yakuzas. Selon Kitano : « Au Japon, arrêter quelque chose est toujours un acte déshonorant. Quand Murakawa est envoyé à Okinawa, il devine qu'il va se faire assassiner. Ce que j'ai voulu montrer ici, c'est ce qui se passe dans la tête d'un homme quand il sait qu'il va mourir ». Mais ce qui fait la force de ces films, c’est une mise en scène truffée d'inventions étonnantes comme dans la scène de Jugatsu où Kitano camoufle un fusil automatique dans un bouquet de tournesols. Ce dernier film est ponctué de moments insolites, après une soirée festive le yakusa Kitano somme son lieutenant de faire l'amour à sa petite amie. Ce dernier s'exécute sous les yeux de son chef, mais l'imprévisible yakuza interrompt leurs ébats, renvoie sa petite amie et essaie de sodomiser son lieutenant. Plus tard, il ordonnera à son lieutenant de se couper le petit doigt et frappera sa petite amie pour avoir obéit à ces injonctions.

Le film criminel illustre et dramatise le rêve américain, que les films soient américains ou non, la  « réussite » pour le gangster consiste toujours à sortir de l’anonymat et à se faire un nom. La tragédie du genre est liée à l’isolement fatal qui suit cette réussite. Le Scarface de De Palma a mille raisons de nous impressionner et de nous émouvoir, la moindre n’étant pas le double satisfecit de notre sadisme : on savoure par procuration le mal que Tony Montana inflige au monde avant de jouir du mal qui le châtie. Le film criminel nous atteint au plus profond de l’âme car la destinée du gangster est une parabole tragique du succès, celle d’un homme qui ne vit que pour lui-même et en meurt.





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1) Pour ce qui est de la thèse selon laquelle une éminence grise travaillant dans l’ombre, un « master mind » qui planifie et organise toutes les activités du crime, on se référera au film de Walsh The enforcer.

2) Scorsese : « I would like to think that GoodFellas comes out the extraordinary tradition spawned by Scarface and The Roaring Twenties ». in A Personal Journey With Martin Scorsese Through American Movies, 1997, Faber & Faber, p. 47.

3) Op cit. p.47.



Le crime organisé à la ville et à l’écran, Etats-Unis, 1929-1951
, de Sophie Body-Gendrot, Francis Bordat, Divina Frau-Meigs, édition Armand Colin,2001

A Personal Journey With Martin Scorsese Through American Movies, 1997, Faber & Faber.




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