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  On the town (c) D.R.

On connaissait Donen un peu pervers, preuve nous en est donnée dans cette rétrospective où la caméra flirt avec les jupons et les jambes des jeunes femmes, où les chorégraphies sont bien moins naïves qu’elles n’y paraissent, dévoilant les dessous et transformant une amitié virile en parade sexuelle.

Quand Donen fait chanter et danser Monsieur et Madame Tout le Monde, permettant au spectateur de se projeter facilement, l’identification se transforme peu à peu en malaise, car le regard du cinéaste n’épargne aucun travers, se plaisant à accentuer les stéréotypes pour mieux les détourner. Gene Kelly en GI viril, collectionneur de femmes et joueur invétéré se transforme vite en icône gay, moulé dans son uniforme aux côtés de ses deux amis non moins maniérés.

Donen aimait à filmer les visages naïfs, voire grotesques, portés par des corps aux gestes incertains. Car si les chorégraphies du couple Donen-Kelly sont réglées au millimètre, faisant preuve d’une inventivité insoupçonnée (les claquettes des poubelles ou la danse des patins à roulettes dans Beau fixe sur New York), les corps dirigés par Donen sont bien moins parfaits, affichant leur grossièreté, se lançant dans des danses effrénées et incontrôlées, mettant en relief leurs caractéristiques disgracieuses. Les corps et les visages des personnages sont bien loin de la perfection. Et si le spectateur s’y reconnaît, c’est pour mieux se remettre en question.

Royal Wedding (c) D.R.

Le charme pervers des films de Donen est fait de visages tordus auxquels répondent des visages lisses, de travailleurs à la chaîne comme de châtelains anglais. Car si la nature humaine est visée avec ironie mais tendresse, le réalisateur n’oublie pas la société dans laquelle évoluent ces personnages bancals : sous le vernis de la comédie, il pointe du doigt le capitalisme et ses usines (Pique-nique en pyjama), les richesses trop facilement acquises (Ailleurs l’herbe est plus verte), et l’industrie du spectacle elle-même, qui cantonne ses créateurs de génie à des travaux sans âme…

Sous le titre « le prince de la comédie musicale » (mais alors, qui en est le roi ?), l’œuvre de Donen se suffit à elle-même. On y trouve une cohésion des thèmes comme une diversité des formes liés par une délicieuse perversion.

On peut alors saluer la Cinémathèque Française d’avoir programmé des films connus ou plus rares, tout en regrettant que certains d’entre eux n’aient été programmés qu’une fois alors qu’ils devaient faire l’objet de deux séances, ce qui ne manque pas de rappeler que le cinéma est un marché et qu’il appartient plus au domaine privé des distributeurs qu’à celui, public, des spectateurs. La critique sociale de Donen est bel et bien d’actualité.




Infos pratiques


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