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Dracula (c) D.R. VAMPIRES
A propos de la rétrospective
de la Cinémathèque Française
Par Morgan CANFIELD


  Dracula (c) D.R.

Comme le rappelle Manuela Dunn Mascetti dans son Chronicles of the Vampire (1), le vampire n’est pas une simple invention de l’écrivain irlandais Bram Stoker, mais plutôt une réinterprétation de plusieurs légendes européennes, dont celles qui entourèrent le prince Vlad Dracul, et de fables plus anciennes encore. C’est toutefois après la parution du roman Dracula en 1897 que le mythe prend forme, et qu’à son tour il influencera l’imaginaire de très nombreux artistes.

En faisant de son personnage un aristocrate et non pas seulement un homme du peuple, Stoker a permis bien malgré lui à un faisceau d’interprétations de se concentrer sur l’image du vampire devenu symbole d’altérité, celui-ci aura conséquemment suscité autant de lectures marxistes que freudiennes. Le vampire, c’est tout autant le riche enjôleur camouflant le cynisme de ses projets, le prédateur qui saigne littéralement le peuple en détournant son énergie à son seul profit, que la pulsion de mort. On ne s’étonnera donc pas que la programmation de la Cinémathèque étende sa définition du monstre au bourgeois chabrolien, comme aux simples assassins et aux manipulateurs.

Horror of Dracula (c) D.R.

Sous cette forme, celle, élégante, du vampire dandy et du riche héritier immortel et épargné par les ans, se dissimule tout ce qui sait révulser l’homme : la maladie, la décomposition des corps, la lente désagrégation, tout ce qui rappelle au monde qu’il est entièrement soumis au cycle du temps. Aristocrate, fortuné, le vampire de Stoker joue de sa séduction d’hypnotiseur pour séduire ses victimes avant de s’en nourrir, ou de les condamner à partager son supplice éternel, en traversant les siècles sans espoir de rédemption.

Trois périodes dans l’histoire du cinéma montrent son évolution : la première, celle du Nosferatu de F. W. Murnau (1921), permettra à l’Allemagne de la République de Weimar d’employer peut-être pour la première fois le cinéma comme un fantastique moyen d’expression avant-gardiste ; la seconde, avec l’avènement des studios Universal, formera l’horreur moderne avec le Dracula de Tod Browning (1931) ; la troisième, celle des films de la Hammer, avec le magnifique Horror of Dracula de Terence Fisher (1958), rendra justice au roman original en n’occultant plus ses intentions sexuelles, et mettra à mal les codes de la censure.

Le cinéaste d’abord occupé à l’expression, puis au divertissement et enfin à la polémique, évolue avec le personnage du mort-vivant qui l’accompagne dans la découverte de son art et le questionnement sur sa fonction de metteur en scène.