LES
RENCONTRES INTERNATIONALES DE CINEMA 2003
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Pour leur neuvième édition, les Rencontres
Internationales de cinéma inauguraient leur déplacement saisonnier,
passant de novembre à juillet, prenant le risque de se voir
un peu noyées dans le grand ensemble Paris Cinéma . L’hommage
à Bulle Ogier, les rétrospectives Solveig Anspach et Djamshed
Usmonov et la carte blanche à Paul Otchakovsky-Laurens, proposaient
déjà un panorama dense de longs-métrages, c'était sans compter
la compétition où concourraient cette année une vingtaine
de longs-métrages, parmi lesquels le documentaire d’Oliver
Stone sur Castro ou le nouveau film de Ferzan Ozpetek (Hammam),
La fenêtre d’en face.
Décrivant l’errance d’une vieille femme de 80 ans, Baboussia
de Lidia Bobrova (réalisatrice russe habituée des Rencontres
où elle avait déjà présenté Dans ce pays-là en 1997)
fit l’unanimité et reçut deux prix (le Grand Prix du public
et le prix d’Arte). Extraño, premier long-métrage de
l’argentin Santiago Loza, fut incontestablement le film le
plus marquant de ces neuvièmes Rencontres. Il s’attache aux
silences et aux gestes timides d’un homme en rupture de la
société. Ex-chirurgien d’un calme olympien, Axel observe les
êtres et les choses autour de lui, déambule dans la ville,
accompagne quelques jours la solitude de sa sœur et de ses
deux enfants, avant de faire la connaissance d’une jeune femme
enceinte, elle aussi esseulée. Volontairement lent et presque
morne, animée de douleurs invisibles et d’apaisements constants,
Extraño se retient comme un poème. Le film a reçu le
prix de la presse. Plusieurs films français étaient présentés
au cours du festival, dont Elle est des nôtres de Siegrid
Alnoy, jeune réalisatrice dont le court métrage Notre amnésie
avait marqué l’édition 2001 de Côté Court à Pantin. Siegrid
Alnoy aime les personnages qui ne sont pas comme les autres.
C’était hier le portrait d’un homme arabe, clandestin débarqué
en France qui vendait des roses à la sauvette, c’est aujourd’hui
l’histoire de Christine, employée intérimaire, la trentaine,
une fille ancrée dans des problèmes de quotidienneté constants,
qui s’invente une vie sentimentale. Mal dans sa peau, pris
de rapports conflictuels avec son entourage, elle tue un jour
sa meilleure amie. Après cet acte, qui lui est presque « libératoire »,
sa vie change, se normalise. Elle trouve un mari, on lui confie
un poste important où elle peut terroriser à loisir un petit
stagiaire… Cette histoire curieuse est filmée de manière très
clinique, avec des plans très composés, surcadrés. Ce
principe de mise en scène laisse en revanche de côté toute
émotion. Et l’on finit très vite par se désintéresser d’un
personnage assez antipathique au demeurant. On retiendra aussi
parmi la sélection française le nouveau film de Jean-Paul
Civeyrac, adapté du roman Hymnes à l’amour de Anne
Wiazemski. Produit par Arte, coproduit par le fidèle Philippe
Martin, sa sortie en salles n’est pas prévue avant 2004. L’ouverture
du film est assez brillante. Elle décrit la montée du désir
entre deux musiciens au cours d’un concert. Echanges de regards,
d’invitations érotiques, le petit jeu amoureux entre ces deux
personnages donne le ton. Comment filmer ce fameux désir amoureux,
comment filmer les regrets aussi, le désamour, la peine d’une
femme délaissée , le poids douloureux d’un deuil ? Jean-Paul
Civeyrac apporte des réponses à toutes ces questions. Il est
décidément bel et bien un grand cinéaste de la mélancolie.
Nous reviendrons en détail sur ce film lors de sa sortie.
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Mélancolique, le film événement du festival
l’était aussi. Good Bye Lénine de Wolfgang Becker était
présenté pour la première fois au public français avant sa
sortie en salles en septembre. 1989, Allemagne de l’Est.
Une mère de famille militante de la cause socialiste tombe
dans le coma à la veille de la chute du mur de Berlin, annonçant
la réunification des deux pays. Pour lui éviter un choc fatal,
son fils Alex, d’une vingtaine d’années, reconstruit autour
d’elle la réalité passée des années Honecker. Immense succès
public en Allemagne (plus de six millions de spectateurs !),
rythmé par la musique de Yann Tiersen, Good Bye Lénine
est autant la description ironique d’une utopie politique
vue par le petit bout de la lorgnette, qu’une histoire d’amour
bouleversante entre un fils et sa mère. Acheté dans de nombreux
pays européens, il s’agit du cinquième long-métrage de Wolfgang
Becker, cinéaste d’une quarantaine d’années.
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