21
Grams de Alejandro Gonzalez Inarritu
Prix du meilleur acteur (Coppa Volpi) Sean Penn
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Trois destins se brisent en l’espace d’un
terrible accident : celui d’un chauffeur en délit de fuite,
celui d’une mère de famille - les victimes de l’accident sont
son mari et ses petites filles -, et celui d’un malade, receveur
du cœur du mari mort. 21 Grams raconte l’histoire d’une
tragédie et de ses conséquences affreuses. Réalisé par Alejandro
Gonzalez Inarritu, à qui l’on doit le passionnant Amores
Peros, 21 Grams est tout d’abord doté d’un regard
distinctif. Le grain de l’image et les couleurs donnent à
l’ouvrage une réelle authenticité. Le réalisateur mexicain
brosse une toile réaliste et peu commune des classes ouvrières
et moyennes américaines. Le film exhibe aussi une structure
narrative intéressante, qui alterne le présent et le passé
d’une façon radicale. 21 Grams s’attaque à des thèmes
graves : l’imprévisible, la perte et la rédemption. Mais,
au final, il déçoit sur le plan narratif. En effet, certaines
prémisses sont absurdes : l’histoire d’amour entre la femme
qui a perdu son mari et l’homme qui a reçu son cœur est peu
crédible. Alors, le scénario de Guillermo Arriega Jordan est,
en fin de compte, plus mélodramatique que contemplatif ou
métaphysique. Avec Benicio del Toro, Sean Penn et Naomi Watts,
le casting est néanmoins impeccable. C’est un film d’acteurs.
Benicio del Toro, charismatique comme à son habitude, est
fort crédible dans le rôle du chauffeur violent en délit de
fuite. Naomi Watts est puissante, bien qu’un peu schizophrène,
dans le rôle d’une femme droguée accablée de douleur. Enfin,
Sean Penn brille dans le rôle du receveur du cœur, un professeur
de mathématiques miné par la maladie, en quête de l’amour
et d’un sens nouveau. C’est l’interprétation la plus complète
et la plus convaincante du film. C’est d’ailleurs cette interprétation
accomplie qui nous permet de passer outre les éléments narratifs
absurdes du film. Penn a largement mérité le prix du meilleur
acteur.
The Agronomist de
Jonathan Demme
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Réalisé par Jonathan Demme, The Agronomist
est le documentaire le plus émouvant et le plus intelligent
du festival. Il célèbre Jean Dominique, un combattant haïtien
pour la liberté de la presse. Formé pour être agronome - d’où
le titre - ce journaliste courageux de la Radio Haïti Inter
combattait sans relâche, pour offrir à son peuple un libre
accès à l’information. Il transmettait, de manière progressive,
des nouvelles en français, puis en créole, au cours des années
cauchemardesques de Papa et Baby Doc Duvalier. Il poursuivi
son œuvre sous le gouvernement du prêcheur populiste de gauche,
Jean Bertrand Aristide. Dans The Agronomist, Demme
nous propose le portrait d’un vrai démocrate. Tué pour sa
cause honorable, Dominique est un vrai héros. La présence
du réalisateur s’efface, mais paradoxalement, Demme a fait
un film politique très personnel. Par le biais d’une série
d’interviews étalées sur dix ans, Demme laisse le journaliste
s’exprimer. Dans cette brève mais fascinante histoire du Haïti
moderne, Demme n’hésite pas non plus à souligner le rôle envahissant
des Etats-Unis, plus particulièrement avec les gouvernements
de Reagan et de Clinton, dans la politique intérieure du Haïti.
Reflétant l’intelligence et la conscience politique de Jean
Dominique, The Agronomist est une œuvre lucide et objective,
à la fois poignante et exaltante.
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