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La FIAC (c) D.R. DE RETOUR DE LA FIAC 2003
Compte rendu
Par Matthieu CHEREAU


La FIAC réserve depuis trois années maintenant une place importante à la vidéo en lui consacrant une aire entièrement composée de petites salles obscures. Vidéo Cube présentait en 2003 une sélection de 9 vidéos. Au-delà de l’apparente hétérogénéité des œuvres, plusieurs tendances se dessinent.


  Zabriskie Point d'Antonioni. (c) D.R.

Se contentant parfois de reprendre des thèmes ou des formes déjà traitées par l’art contemporain depuis quelques années, ou faisant le choix d’innover - au risque de laisser sceptique, les vidéastes expriment souvent dans les œuvres exposées le souci de scruter des formes pures. Mark Lewis, au moyen d’un très lent zoom arrière, part d’un lac recouvert de neige (ce qui donne lieu à un écran vierge de tout motif ou couleur), pour peu à peu découvrir au premier plan une haie de sapins, haie qui s’avère n’être que la partie infime de la forêt qui encercle le lac. Passant de l’abstrait au figuratif, la caméra ré-explore les multiples facettes du paysage. Ailleurs, Tania Mouraud filme à travers la vitre tout embuée de sa voiture les paysages imprécis et déserts d’une campagne enneigée. Les gouttes qui s’amoncellent sur la vitre déforment le dehors, l’un se mêle à l’autre, la buée et la neige ne forment plus qu’un tout indéfini mais presque tangible. Qu’il s’agisse de filmer un lac, un bâtiment de banlieue ou un paysage impressionniste, il apparaît que ces vidéastes, en recourant massivement à la caméra DV, privilégient une approche documentaire des formes qu’ils filment, donnant ainsi à leurs œuvres une valeur de témoignage. C’est la raison pour laquelle il nous semble pouvoir dire, en partant de ces quelques œuvres (tout en tenant compte des celles qui les ont précédées, au premier rang desquelles celle retraçant les nuits de Warhol), que la vidéo, telle qu’elle est exposée au musée, traduit bien souvent les mêmes préoccupations qu’un cinéma qui, davantage qu’un sujet, traite d’une forme, exprime à travers ses images la nécessité de montrer, et confère à ces dernières un attachement inexplicable. Mark Lewis endosse d’ailleurs cette filiation, inscrivant sa série de films sous le signe du « post-cinéma » (sic), manière de dire qu’en s’attachant au non-lieu et au non-événement, il ne fait que prolonger une tendance du cinéma qui tend à scruter le réel, plutôt qu’à le manipuler pour mieux le mettre en scène.

Outre le fait de relayer la fascination qu’éprouve le cinéma pour les choses, la vidéo, telle qu’elle est exposée dans les galeries d’art contemporain, c’est-à-dire souvent sous la forme d’installation, prolonge l’un des grands fantasmes du spectateur qui est de ne faire plus qu’un avec l’image. Buster Keaton s’y était déjà essayé. Le spectateur d’installation peut désormais participer de manière interactive à ce qu’on lui montre, selon diverses modalités - l’ombre projetée sur l’écran (comme c’est le cas dans (Other) points of view d’Olga Kisseleva) ou encore le son modulé en fonction des mouvements du visiteur. Dans d’autres cas, l’image s’incurve, laisse au spectateur la liberté d’entrer en elle, ou du moins lui en donne l’impression (comme c’était le cas pour l’installation de Doug Aitken, à Beaubourg au Printemps 2003).