Concernant les autres films
de la compétition, le second long-métrage de fiction d’Arnaud
des Pallières, Adieu, n’a pas laissé indifférent, irritant
les uns et bouleversant les autres. Mystification ou l’histoire
des portraits au contraire est d’une insipidité si frappante
qu’il mérite une indifférence complète. Si ses dialogues et
ses costumes ne sont pas sans rappeler l’excellent Mods,
Mystification… est ennuyeux et maladroit là où le film
de Serge Bozon est agile et poétique. Le fait que l’équipe
de Mods participe au film (Serge Bozon, Laurent Lacotte
et Axelle Ropert) n’y change absolument rien.
Venant en aux courts-métrages.
Encore une fois, on a vu de tout, de la ballade autobiographique
de Philippe Katerine avec sa caméra vidéo (1km à pied)
à la fiction la plus convenue et ennuyeuse (Am see,
d’Ulrike von Ribbeck), en passant des films conçus à la manière
de jeux vidéos (comme le ludique Do you have the shine ?
de Johan Thurfjell.). Le grand prix étranger revient à un
film singulier, Courant d’air, qui retrace vraisemblablement
les préparatifs d’une fête en Arménie, et tourne autour de
figures de l’enfance. Personne dans ce film ne parle si bien
qu’on entend effectivement que le vent traverser les pièces.
Et pourtant, dans ce silence légèrement contrarié tout parle,
le moindre objet revêt un tel éclat, une telle couleur, qu’il
dit à la fois sa douceur (les cheveux peignés, la peau de
l’enfant) et sa beauté (les fleurs à la fin du film). On est
bien loin d’un tel climat apaisé avec le film vide pour
l’amour, que l’on aurait presque, si l’on n’avait pas
rencontré le réalisateur, imputé à Bruno Dumont, tant plane
au-dessus de ce film les grands thèmes du réalisateur de La
vie de jésus (l’un et l’autre d’ailleurs occupent ou ont
occupé les locaux du Fresnoy, ce qui n’est peut-être pas un
hasard). Dans un tout autre registre, la grande et frêle Anna
Mouglalis a fait une apparition remarquée au festival pour
présenter La maladie de la mort (d’Asa Malder). Certes,
la forme est surfaite. Asa Malder, s’il a filmé en super 8,
n’est pas avare en effets et ne se prive pas de dénaturer
son film au point parfois d’en faire quelque chose qui s’apparente
à un clip. La belle Anna sauve néanmoins la mise et l’on doit
bien reconnaître que la fascination de l’artiste pour sa muse
trouve dans le film une certaine résonance. Reconnaissons
ainsi que dans ce film maniériste et irritant, demeurent ici
et là des scènes d’une indéniable beauté.
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Les documentaires enfin.
Permettons-nous de passer rapidement sur le prix du long-métrage
documentaire. Abel Ferrara : not guilty est certes
intéressant, mais se contente de suivre le réalisateur new
yorkais qui parade et frétille comme un poisson dans l’eau.
Qui le prix récompense-t-il alors, le personnage filmé ou
le réalisateur ? Dans un tout autre ordre d’images, Métamorphose
de Jean-Claude Guiguet se propose de scruter les transformations
de paysage au gré du temps. La caméra, toujours fixe, observe
ainsi le même tableau changer du tout au tout d’un jour à
l’autre. Frank Ciochetti reprend ce genre de dispositif dans
L’exemple de Ramuz, mais son film présente l’intérêt
d’être plus intime que le précédent et sans aucun doute plus
riche du point de vue de la forme (aux plans impressionnistes
de montagnes suisses répondent des plans abstraits qui rappellent
Brakhage). Le dernier film d’Ange Leccia enfin - Azé
-, ennuie rapidement du fait d’une structure trop répétitive
et parfois didactique, l’auteur mettant alternativement le
doigt sur les motifs de dépaysement du pays qu’il parcourt
(la musique, passée en boucle, finit par donner des maux de
tête), et les motifs plus troubles liés au régime en place
et au sentiment d’insécurité.
Au total, le bilan des films en compétition cette année est
relativement bon. Les prix ont le plus souvent récompensé
de bons films, à l’exception notable du bouleversant Adieu,
d’Arnaud des Pallières.
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Palmarés
Prix du jury
des films de fiction
Grand Prix
du Long Métrage Français : L'Esquive d'Abdellatif
Kechiche
Grand Prix du Long Métrage Etranger :
Il dono de Michelangelo Frammartino
Mention spéciale à : Xavier de Manuel Mozos
Grand Prix du Court Métrage
Français
Petit Pas
de Thomas Salvador et La nuit sera longue
d'Olivier Torres (Ex æquo)
Grand Prix du Court Métrage Etranger : Courant
d’air de Nora Martirosyan
Prix Gérard Frot-Coutaz : L'Esquive d'Abdellatif
Kechiche
Prix Léo Scheer : Le Dernier des immobiles
de Nicola Sornaga
Films Documentaires
Grand Prix du long-metrage
documentaire : Abel Ferrara – Not Guilty
de Rafi Pitts
Grand prix du court-métrage documentaire : Grand
Littoral de Valérie Jouve
Prix du Public - Long Métrage : L'Esquive
d'Abdellatif Kechiche
Prix du Court Métrage : Balcon Atlantico
de Hicham Falah et Mohamed Chrif Tribak
Prix du Documentaire : La Chimère
des héros de Daniel Rosenfeld
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