Ainsi donc, la version 2004 du festival
de Clermont restera dans les annales dans la mesure où, pour
la première fois, un jury, présidé par Mathieu Amalric, a
décidé de n’attribuer aucun grand prix à la sélection française.
Quelle leçon d’extrême exigence et quelle dureté d’âme en
même temps ! Quel camouflet et pour les producteurs et
réalisateurs, et pour les sélectionneurs de Clermont !
En tout cas, cette décision a fait l’effet d’un véritable
coup de tonnerre dans le (petit) milieu du court métrage,
mais c’était exactement le but recherché : créer un électrochoc
afin de secouer les habitudes et de provoquer une réaction
salutaire.
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Je dois avouer, pour ma part, que
je comprends la décision du jury. Il faut bien reconnaître,
au vu des quelques programmes de la sélection française,
que l’on est frappé par le caractère médiocre, plat, terne
de l’ensemble, par le manque d’invention de d’originalité.
Trop de films sages et lisses qui se ressemblent.
A ce propos, on peut essayer de tracer le profil type du
court métrage français moyen tel qu’on peut en voir à la
pelle à Clermont, bref évoquer « une certaine tendance »
du court métrage français. En général, il emprunte le détour
de la chronique plutôt que du récit, il donne dans le réalisme
voire le naturalisme, enfin il fait rarement moins de 20
minutes, dénotant chez nos auteurs une fâcheuse incapacité
à faire dans la concision. D’une certaine façon, ce sont
des films trop libres, qui vivent mal leur absence de contraintes
(je ne parle pas financièrement). Du coup on en arrive à
ce terrible paradoxe : l’absence de formatage trop
strict crée des films formatés. Selon l’explication du jury,
cela trouve son explication dans les perversités du système
français de financement des films, au premier chef le CNC
bien sûr.
La chronique, c’est quoi ? C’est une structure narrative
ouverte, refusant la construction dramatique trop rigide,
qui vise la captation de moments de réels, plus ou moins
intenses, plus ou moins plats, et dont l’assemblage, souvent
lâche, fait le film. Du coup, on voit trop de films informes,
bancaux, qui ne font plaisir qu’à leur auteur. Il faut ajouter
une terrible propension à la lenteur, à la longueur, et
surtout à l’absence de rythme : l’encéphalogramme plat
domine, des courts qui donnent l’impression d’être des longs.