La force de ce film tient surtout dans
la finesse de sa composition. C’est d’abord une fiction qui
reconstitue un récit autobiographique. C’est ensuite le récit
d’une identité en mouvement, de l’esquisse d’un personnage quasi
mythologique en devenir. C’est enfin une richesse visuelle permanente
qui tend très vite plusieurs miroirs : entre le paysage et le
personnage, entre le personnage et le spectateur, entre la musique
et le paysage, entre le paysage et le spectateur.
À la sortie de la salle, le charme du film a bien du mal à s’estomper.
Walter Salles, très curieux, recueille avec intérêt les impressions
des spectateurs, les yeux encore embués par ces beaux paysages.
L’occasion est trop belle pour ne pas la saisir et lui demander
les raisons de mettre en scène un tel film :
« Je
voulais transmettre à ma génération la vision d’une jeunesse,
d’une identité latino-américaine. Cette identité, je n’ai pas
de réponse, de définition précise pour l’expliquer, mais mon
film montre ces éléments de réponse.
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Ce
qui m’importait et ce qui m’intéresse toujours dans l’histoire
d’un mythe, ou dans l’Histoire, tout simplement, c’est ce
qui constitue son début, comment des germes se forment. Ici
comment la volonté et l’évolution de son identité par rapport
à l’idée de l’Amérique latine, comment le jeune Ernesto la
vit.
Je n’ai pas voulu justifier l’idéologie de Guevarra,
j’ai préféré me focaliser sur des éléments, des fragments
de cette période de la vie de Guevarra qui l’ont amené à avoir
cette nouvelle vison du monde. Quant au travail de Gael Garcia
Bernal, il est immense, puisque avant même de tourner, il
avait déjà réalisé quatre mois de préparation intense au rôle. »
Retour au Forum des images où la soirée du dixième anniversaire
des Rencontres Internationales de Cinéma battait son plein.
Pour l’occasion, le buffet était résolument latino-américain.
Ce qui ne semblait pas déplaire à Tim Roth, qui après nous
avoir serré la main chaleureusement nous confiait son enthousiasme
grandissant pour le cinéma d’Amérique latine : « La
rencontre avec Walter, mon travail avec lui pour son prochain
film, tout cela m’a ouvert les yeux sur cette culture latino-américaine.
Ce court-métrage est beau par la force des sentiments qu’il
évoque sans la parole. Ce choc des images est puissant, à
l’image de sa fin. »