L’été fut frais cette année dans l’ouest de la Bohême. Mais
Karlovy Vary, jolie station balnéaire longtemps connue sous
le nom de Carlsbad du temps où elle recevait les nantis de
l’empire des Habsbourg, a accueilli comme il se doit pour
sa 39e édition le Festival International du Film
le plus important d’Europe centrale. Du 2 au 10 juillet 2004,
plus de 230 films ont été projetés dans le cadre de 20 sections
différentes.
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Rares sont les festivals
aussi ouverts au public que celui de Karlovy Vary, ce qui
transforme évidemment l’ambiance de la manifestation. La première
quinzaine de juillet, les rues de la station balnéaire sont
parcourues presque 24 heures sur 24 par des centaines d’étudiants,
au milieu desquels se faufilent les journalistes, organisateurs
et producteurs des films. Ce festival international de catégorie
A, qui a résisté à l’époque communiste en Europe centrale
et orientale, incarne de plus en plus le cinéma européen dans
ce qu’il a de plus singulier et innovant. Et surtout pour
des cinématographies oubliées de différents pays à l’est de
l’Allemagne. Cette année, le panel de films européens y est
impressionnant : avec une sélection de films tchèques
récents, une série de Dix meilleurs films turcs et
plusieurs films d’ex-Yougoslavie, de Pologne et de Russie,
le festival de Karlovy Vary fait fort. Quinze films de fiction
y ont été présentés en compétition officielle, ainsi que 20
films documentaires pour une compétition dédiée au genre.
Pour Eva Zaoralova, directrice artistique du Festival depuis
1994, il s’agit avant tout de « réserver une plus
grande place aux films qui ne sont pas dans les sélections
des autres festivals ».
Une plus grande place aux films
rares et aux films européens
Le jury a distingué cinq films européens, mettant en avant
l’extraordinaire richesse du festival dans ce domaine. Le
Crystal Globe - Grand Prix pour le meilleur film de fiction
- a été accordé au film itlalien Certi bambini
(Histoires d’enfants), réalisé par les frères Andrea
et Antonio Frazzi en 2004. Le film met en scène les souvenirs
violents d’un garçon de 12 ans déjà mêlé aux trafics et crimes
de son quartier. Construit à partir d’un trajet en métro du
garçon, pendant lequel lui reviennent en mémoire ses expériences
sentimentales, criminelles ou familiales, le film se décline
sous forme d’analepses et de fondus enchaînés, capables de
rendre toute la puissance émotionnelle de cette adolescence
hors du commun. Le Prix Spécial du Jury a été remis au film
croato-bosniaque Tu (Ici),
réalisé en 2003 par Zrinko Ogresta. Ce long-métrage décrit
le quotidien de plusieurs personnages dans un Zagreb mal remis
des conséquences de la guerre des Balkans, où se côtoient
les désillusions d’une jeune droguée, d’un vieux mélomane
solitaire, d’un ancien soldat qui rêve de reconquérir son
ancienne maîtresse ou encore d’une vedette de film devenue
alcoolique. Le film espagnol León et Olvido,
de Xavier Bermúdez, a quant à lui été distingué à deux reprises,
par le Prix du Meilleur Réalisateur et celui de la Meilleure
Actrice, attribué à Marta Larralde, ex-eaquo avec Karen-Lise
Mynster pour son rôle dans le film danois Lad de små børn
(Les Conséquences) de Paprika Steen. L’excellent
film allemand Napola, de Dennis Gansel, a remporté
le Prixdu Meilleur Acteur, grâce à la prestation du jeune
Max Riemelt pour le rôle d’une jeune allemand recruté dans
une école d’élite nazie. Les films allemands se sont d’ailleurs
plus que distingués lors de cette édition du festival. L’excellent
Gegen die Wand de Fatih Akin, depuis
sorti en France, a été présenté dans la section Horizon et
obtenu d’emblée les ferveurs enthousiastes du public. Cette
histoire très individuelle, sise au sein de la communauté
turque d’Allemagne, est celle d’une jeune fille qui épouse
un homme en marge de la société mais d’origine turque pour
échapper au poids de la famille.
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