Côté programmation,
cette édition 2004 du Festival de Brive fut un bon résumé
de ce qu'est actuellement le cinéma d'auteurs français.
Et, globalement, ce n'est pas très folichon. Les thèmes
abordés ainsi que leur traitement sont loin d'être originaux.
À voir Dremano Oko, film tourné par un ancien élève
de la Fémis, mais bien plus serbe que français, on voit
le danger qui guette un certain cinéma hexagonal : celui
de se complaire dans la pose plutôt que traiter du monde
qui l'entoure. Vie matérielle, Mystification,
et quelques autres moyens-métrages présents à Brive sont
des films d'une grande lourdeur, qui assènent leur pseudo-intelligence
à grands coups de références littéraires absconses.
Ce déficit de qualité
pourrait être imputée aux organisateurs. Mais ce serait
se voiler la face. Un fils, moyen-métrage sorti cet
été en salles, renvoie aux mêmes tares. Et, d'ailleurs,
Katell Quillevéré a énoncé un fait plus qu'intéressant lors
du festival, un fait qui concernait les documentaires mais
qui pourrait être étendu aux films de fiction. Lors de sa
sélection, Katell Quillevéré a donc remarqué que la plupart
des documentaires qu'elle a visionnés affichaient une durée
de 52 minutes. Et ce qui peut paraître fou, c'est que cette
donnée temporelle était la même, que les films soient autoproduits
ou financés de manière plus classique, avec aides du CNC,
des chaînes ou des régions.
Le cinéma français connaît donc
une forme de standardisation sourde. Il suffisait d'ailleurs
de voir les fort passionnants débats organisés dans le cadre
du festival pour le comprendre. Les films hexagonaux souffrent
d'un système trop bien huilé. Cette affirmation peut paraître
absurde : en quoi une mécanique de financement efficace
pourrait-il nuire à la qualité artistique des films qui
en résulte ? Et bien peut-être par une trop grande place
accordée aux scénarios dans le processus de décision, peut-être
aussi par un refus de quitter le giron du film d'auteur
pour celui du film de genre, peut-être aussi en refusant
d'observer les politiques menées par nos voisins, et peut-être
enfin en n'accordant que peu de place aux moyens-métrages.
Car de Renoir
à Eustache, des cinéastes illustres ont montré tout l'intérêt
que peut revêtir ce format. Des exemples qui devraient faire
comprendre qu'entre 30 minutes et une heure ne doit pas
subsister le no man's land actuel. Combien de films français
s'étendent dans la durée pour ne finalement que tourner
en rond ? Combien de bonnes idées sont étirées jusqu'à la
corde, ou inversement réduites à un fil, pour rentrer dans
la case du long ou du court ? S'il n'y prend pas garde,
le cinéma français mourra de son trop grand rationalisme
économique.
Palmarès du festival Grand prix du jury : La Peau trouée de Julien
Samani
Doté de 5000 € de pellicule par Fujifilms et
de 4000 € de travaux de laboratoire par Centrimage
Prix du jury : Dremano oko de Vladimir Perisic
Doté de 1500 € par la SOCIETE DES REALISATEURS
DE FILMS
Mention du jury : Malika de Pierre Chosson
Prix du public : Dremano oko de Vladimir Perisic
Doté de 1500 € par la Société Générale de la
Corrèze