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(c) Thibaut Degenne PREMIER ASSISTANT
Le diapason du cinéma


Par Chloé CHAMBARET
Photos de Thibaut DEGENNE


Selon la convention collective des techniciens de la production cinématographique, datant de 1950, le premier assistant "seconde le réalisateur dans la préparation et la réalisation artistique du film" ! Qualifications tout aussi floues qu’obsolètes !



  (c) Thibaut Degenne

Ce n’est qu’en 1994 qu’Eric Bartonio et Michel Cheyko élaborent une définition approfondie et actualisée de leurs fonctions. Est-ce possible que les métiers du cinéma soient si mal connus des cinéphiles, délaissés des écrivains, ignorés par les éditeurs spécialisés ? A vous de juger si nos techniciens, ces ouvriers du grand écran, ne méritent pas tout autant d’être applaudis que les étoiles d’un soir qui se trémoussent sur les tapis rouges ? Si vous n’êtes pas diplomate ni un pro de l’organisation, encore moins un as de la prévoyance, aux nerfs d’acier et doué d’une mémoire visuelle égale à celle de votre magnétoscope, le métier de premier assistant peut nuire gravement à votre santé. Toutefois, à condition d’un sens inné de la débrouillardise et d’un moral bloqué sur "beau fixe", le jeu en vaut la chandelle.

Avant de se lancer pieds et poings liés, le producteur fait appel au premier assistant pour une pré-analyse du scénario, qui détermine le nombre de cachets, de décors, et le temps du tournage, nécessaires à la réalisation du film en question. C’est la base du devis que chiffrera la production. Le travail du "premier" s’opère ensuite en deux phases très distinctes : la préparation et le tournage.

(c) Thibaut Degenne

En préparation, on effectue un travail de laboratoire, de minuterie, et tout cela dans le même bureau, celui du premier assistant. Le gros du labeur s’appelle le plan de travail. Il s’agit de construire un calendrier de tournage qui tienne compte de la disponibilité des comédiens, des volumes de figuration requis pour chaque scène, aussi bien que des décors, naturels ou studio, intérieurs ou extérieurs, de jour ou de nuit, etc... Pas évident de prévoir par exemple, une scène de montagne (ski) avec Depardieu sachant que cet acteur n’est libre qu’en juillet ! Impossible de proposer une nuit suivie d’une journée (et on dort quand ?) ! Surtout filmer d’abord les scènes où Sigourney Weaver a les cheveux longs, PUIS celles où elle a le crâne rasé ! Avis aux amateurs de rubik’s cubes et autres casse-têtes chinois, le plan de travail, c’est votre dada !

Bien entendu, vous éviterez soigneusement de commencer par le début et de terminer par la fin; au début on ne se connaît pas encore assez bien pour évoluer en parfaite symbiose, et à la fin, on n’en peut plus de se voir (pensez aux très émouvantes scènes d’amour de "lunes de fiel" de Roman Polanski.)

Notez également l’importance de vos responsabilités, car votre plan de travail influe directement sur la location de matériel et du studio, sur la mise en chantier des décors, l’achat de matières premières, la taille de l’équipe technique, etc. Il servira de bible dans chaque département (costumes, décors, régie...).
Mais surtout, n’oubliez pas qu’au bout de quinze jours, quand vous aurez enfin accouché de ce petit trésor - et perdu 5 kilos -, Depardieu ne sera plus libre en juillet mais en octobre (et finalement on tourne à la mer !), Sigourney aura opté pour la solution perruque et le metteur en scène réécrit son scénario trois fois.