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Vous vous dîtes :
"pour le premier, la prépa, c’est la galère".
Et pourtant, je ne vous ai pas encore parlé du rôle
du "premier" dans le casting (figurants, silhouettes,
talents), et dans les repérages (que vous gérez).
Sans compter que parallèlement, il faut mettre sur
pieds un calendrier de la préparation en fonction de
chaque département (ex : essayage perruque tel jour,
visite des décors...).
Dans le même temps, vous exécutez un dépouillement
afin de prévoir par séquence tous les éléments
de jeux (un chien, une voiture, des clous pour accrocher un
tableau, des gens pour bloquer la circulation, etc) que vous
devrez communiquer à qui de droit (le chien à
l’animalier, les clous à la déco, etc.). Et
finalement, après 4 ou 5 semaines et pendant 3 ou 4
jours, vous vous verrez l’heureux animateur de la lecture
générale du scénario : tout responsable
de département y est convié, et ne pourra s’en
échapper avant que tout problème d’interprétation
ait été réglé.
Admettons que le scénario dise : "ext / nuit :
Julien se fait agresser par une bande de voyous". Le
chef-opérateur propose que la rue soit mouillée
pour pouvoir filmer à travers les flaques d’eaux. Mais
la costumière ne veut pas que ses costumes soient salis
et le directeur de production refuse d’investir pour les doubler.
De la conceptualisation à l’image, vous n’avez qu’un
seul mot d’ordre : "unisson".
Tout est enfin prêt et vous êtes même parvenus
à vous ménager une semaine de tranquillité
pour fignoler quelques derniers détails. Félicitations.
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Le premier jour de tournage
- comme tous les autres d’ailleurs, vous arrivez sur le plateau
parmi les premiers. Votre but : respecter le plan de travail,
ce trésor que vous connaissez plus que par coeur !
(Ainsi un machino vous arrête : "au fait quand
c’est qu’on tourne la scène en dirigeable ?" Vous
: "la scène 822, c’est prévu le jeudi 27
mars au matin."). Vous allez donc réveiller d’un
coup de poing amical les quelques endormis qui n’ont pas l’air
de savoir combien ça coûte, une heure sup dans
le cinéma. Une fois tous les matelots à leur
poste, vous pouvez faire venir le commandant et ses interprètes
pour une mise en place. C’est simple, non ?
Malgré votre prévoyance, Joan Collins n’est
pas là. Comme tout bon flic, car c’est bien ce que
vous êtes, vous faites votre enquête pour déterminer
si la faute incombe au perruquier (qui a perdu son tube de
superglu), aux habilleuses (qui ont interverti les costumes
de Joan et ceux de Roseanne Barr), ou à l’actrice elle-même
qui a passé une heure au téléphone avec
Marlon Brando). Vous réprimandez le coupable, et comme
au fond de vous sommeille un être humain, vous affirmez
aux producteurs : "Joan a fait une allergie au poisson
hier soir, la maquilleuse a dû se donner beaucoup de
mal."
Vous abandonnez alors votre metteur en scène et ses
comédiens à leurs répétitions
pour vous consacrer quelques instants à la feuille
de service du lendemain (horaires de convocation, transports,
éléments de jeu...). Celle-ci sera plus tard
distribuée à tous par les bons soins de votre
adjoint.
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Il est maintenant l’heure
de vous entraîner à la mise en scène sur
quelques malheureux figurants qui n’en demandaient pas tant.
On ne les verra peut-être même pas à l’écran.
Mais votre oeil déguisé, qui les parcoure inexorablement,
est à l’affût de toute dissonance; et pourtant,
le viking qui a gardé sa swatch ne se sent pas concerné
le moins du monde ! En général, les cascadeurs,
plus avertis, vous éviteront ce type de non sens :
il vous suffit de bien orchestrer le tout, et vous obtiendrez
un réalisateur comblé.
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