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Huit Femmes (c) D.R. LE DECOR DE "HUIT FEMMES"
Glamour, Mélo et Cinéphilie
 


Avec Huit femmes, François Ozon a réalisé un film hommage à l'âge d'or d'un cinéma dont il s'amuse à reprendre certaines figures : actrices ultra-glamourisées, situations mélodramatiques au-delà du vraisemblable, image lyrique et flamboyante des décors hollywoodiens.


Tout comme les nombreux débordements mélodramatiques de l'intrigue : mensonges, révélations, gifles ou étreintes, l'ensemble des éléments présents à l'image a fonction de référent cinématographique. Costumes, coiffures, motifs du générique… sont autant de clins d'œil qui renvoient à tel film, telle actrice célèbre, tout en accentuant la caractérisation des personnages. De même, le décor fait bien plus qu'offrir un simple cadre à l'action, il participe à la création d'un univers visuel qui exalte l'artifice et l'exagération. Comme le film, le décor puise son inspiration dans la cinéphilie, tout en affirmant sa convention théâtrale.

  Huit Femmes (c) D.R.

Dès la première séquence, nous découvrons un univers factice. Le paysage enneigé (le ciel, le parc, la maisonnette) révélé par la caméra est clairement une toile peinte panoramique, dans un décor en studio qui s'affirme comme tel, et qui nous situe d'emblée dans un univers de représentation.

L'extérieur de la maison nous montre un manoir de style anglais, souvent synonyme de mystère dans la fiction littéraire et cinématographique : Rebecca, Les innocents…et annonciateur d'une ambiance à la fois cossue et désuète, typique des "whodunits" d'Agatha Christie.

Prisonnières de cette demeure isolée, les huit femmes vont s'y affronter jusqu'à la révélation finale. Retenant la leçon des huis-clos chers à Alfred Hitchcock, François Ozon se garde bien "d'aérer" la pièce qu'il a adaptée et risquer ainsi de rompre l'unité dramatique : nous entrons dans le décor pour ne plus en ressortir (excepté quelques plans très courts).

Huit Femmes (c) D.R.

Pour les intérieurs, comment trouver un décor réel offrant à la fois les dimensions et les points de vue nécessaires à l'action, les déplacements de la caméra, et une disponibilité de plus de trois mois? Le décor fut entièrement construit dans un studio, où les deux mois de tournage se déroulèrent loin de toutes contraintes ou interférences extérieures.

L'organisation spatiale rappelle la scène d'une pièce quelconque de boulevard : un vaste salon bourgeois où vont se succéder les disputes et les réconciliations.

Sur ce salon donnent d'un côté l'entrée, surélevée pour mieux dramatiser les arrivées successives des actrices et aussi pour animer l'espace; par ailleurs des alcôves, jeux de rideaux, portes où se dissimulent et s'épient les personnages.

La situation est semblable (mais inversée) à celle de Marie-Octobre, film à décor unique de Julien Duvivier où Danielle Darrieux est confrontée à 9 hommes dont un seul est coupable. Mais Huit femmes pousse la théâtralité jusqu'à bout, lors du plan final où toutes les comédiennes se tiennent côte à côte comme sur une scène, prêtes à saluer un public imaginaire.