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Ghost World (c) D.R. GHOST WORLD LE FILM
Regard frais et pertinent sur
l’adolescence américaine
Par Jean-Pierre TABONE


SYNOPSIS : Ghost World, c'est l'histoire d'une amitié finissante entre deux adolescentes, à la fin du lycée, un été. Adapté d'une bande dessinée éponyme de Daniel Clowes - auteur culte aux Etats-Unis - le film est réalisé par Terry Zwigoff. Ce dernier avait déjà exploré le médium illustré avec Crumb, documentaire iconoclaste et remarqué sur le pape du comix underground U.S. Sorti il y a presque un an aux Etats-Unis, Ghost world - largement plébiscité outre-Atlantique - arrive enfin sur nos écrans le 5 juin prochain. Au public français de se faire maintenant une opinion.

  Ghost World (c) D.R.
Alors qu'il se promène dans la banlieue de Chicago, ville dans laquelle il est né, Daniel Clowes, quadragénaire et auteur de comic books, aperçoit l'inscription Ghost World taguée minutieusement, en petites lettres, sur la porte d'un garage. Il trouve l'association de ces deux mots très poétique et très évocatrice. A l'époque, il a en tête l'histoire de deux adolescentes, portrait craché de copines qu'il a l'habitude de côtoyer et dont il est le témoin silencieux des conversations. Ghost World apparaît sous-forme d'épisodes dans le n° 11 du magazine Eightball, où Clowes dessine et écrit des scénarios. Le reste appartient à l'histoire.


RENCONTRE DE DEUX PERSONNALITES ORIGINALES

Terry Zwigoff, le réalisateur de Ghost World, la cinquantaine passée, n'avait réalisé jusqu'à présent que deux documentaires. Louie Blue (1985) qui narrait la vie d'un blues man des années trente et Crumb (1994), biographie sur le célèbre dessinateur underground dans laquelle il y transcende le genre en y apportant une touche très personnelle. Le film fut salué par la critique américaine et reçut de nombreux prix. Zwigoff connaît ensuite un véritable passage à vide. Il écume les festivals de cinéma, son film Crumb sous le bras. "J'essayais de placer mon film et de me faire payer le gîte et le couvert" dit-il, goguenard ! Il y visionne de nombreux films à la recherche de nouvelles idées. Son agent lui envoie de nombreux scripts pour lesquels il ne ressent aucune affinité : "c'étaient des histoires à cent mille lieux de ce que je voulais faire et tellement mal écrites."

Terry Zwigoff (c) D.R.
Quand soudain, c'est le déclic ! Sa femme, qui travaillait dans une maison d'édition de bandes dessinées, Last Gap, lui conseille d'adapter au cinéma un " graphic novel " (roman illustré) qu'elle a beaucoup aimé, Ghost world de Daniel Clowes. Les deux hommes se donnent rendez-vous à Berkeley, où Clowes réside avec sa femme Erika. Une grande amitié va naître alors entre eux. "Quand j'ai vu Daniel pour la première fois, j'ai senti que le courant passait bien entre nous. Cela m'a rappelé une autre rencontre, celle de Robert Crumb, vingt-cinq auparavant."

L'écriture du scénario de Ghost World va s'étaler sur presque deux ans (l'aventure du film sur presque sept ans !) et va connaître une vingtaine de moutures différentes ! "Dan et moi n'avions aucune idée de la façon d'écrire un scénario pour une fiction. Nous avons appris sur le tas, tout comme j'ai appris la direction d'acteurs en suivant des cours de théâtre." se rappelle Terry Zwigoff. "Au début, nous avions essayé d'adapter de façon littérale ma bande dessinée. Mais bien vite, nous nous sommes aperçus que cela ne donnerait rien de satisfaisant. L'humour qui fonctionnait sur le papier ne fonctionnerait pas sur la pellicule." précise Daniel. D'un commun accord, les deux amis décident de ne garder de la bande dessinée que les personnages féminins d'Enid et de Rebecca et l'époque (la fin du lycée en été).