LES ENJEUX DE L’ADAPTATION :
DE L’ALBUM AU SCENARIO
CORTO MALTESE EN SIBERIE : L’ALBUM
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Au début de Corto
Maltese en Sibérie on retrouve notre héros,
en novembre 1918, chez lui dans sa demeure de Hong Kong. Corto
et Raspoutine partent ensemble pour le compte de la société
secrète, les Lanternes rouges, à la recherche
d'un train d'or de la Russie impériale.
Corto croise durant cette aventure le Colonel Ungern
Von Sternberg , le célèbre baron
fou, partant à la tête de sa cavalerie asiatique
" Cette aventure se termine dans la province chinoise du Jiangxi,
en avril 1920 par une ultime rencontre de Corto et de la révolutionnaire
Shanghai Li. Dans cette histoire, apparaît également
un major de l'armée blanche du nom de Nino Iaroslav.
Dés le début du projet d’adapter Corto Maltese
au cinéma, le choix de l’épisode fut l’objet
d’un débat au sein de la production. " Il
y avait bien sûr la Ballade de la mer salée "
explique le producteur : " un livre fondateur
de la saga Corto Maltese mais qui nous posait des problèmes
d’adaptation graphique ; mers et palmiers dessinés
sur grand écran sont peu crédibles. Corto Maltese
en Sibérie s’imposa assez vite : une structure
linéaire mais pleine de rebondissements, de faux-semblants. "
Dans cet album les personnages de Corto et de Raspoutine
ont une vraie consistance, ils traversent une période
historique très dense, ce qui donne de la matière
au récit.
Mais déjà les problèmes d’adaptation
graphique apparaissent et le passage de la bande dessinée
à l’écran s’avère délicat. Ainsi,
il a fallu trouver un Corto de dessin animé qui soit
fidèle à celui d’Hugo Pratt et qui puisse être
dessiné de la même manière par soixante
personnes différentes.
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L’important était
donc plus de rester fidèle à l’esprit de la
bande dessinée qu’à la lettre. Car l’animation
sur grand écran a ses exigences propres que les réalisateurs
ont été obligés de prendre en compte.
L’album est entièrement dessiné en noir en blanc.
Le but premier était donc d’ajouter de la couleur et
du mouvement aux dessins d’Hugo Pratt ainsi que de nouveaux
décors dont il était particulièrement
économe. Un travail important de recherche historique
et graphique a été mené mais, le résultat
final ressemble pas aux dessins d’Hugo Pratt.
En effet, Pratt détache dans la plupart de ses vignettes
ses personnages sur un fond blanc ou noir, ce qui fut une
révolution dans la narration graphique mais qui est
difficilement transposable à l’écran. Pour le
choix des couleurs, les dessinateurs se sont laissés
guider par les émotions qui naissent à la lecture
de l’histoire. Pour les décors, il a fallu que les
créateurs lecteurs redessinent ce qu’ils avaient imaginé
à la lecture des albums. De Shanghai à la Sibérie,
le travail est colossal.
L’idée était donc de dessiner tout ce que Pratt
avait fait imaginer au lecteur plutôt qu’à partir
de ce qui est était déjà présent
sur la page de l’album. De même, en ce qui concerne
le scénario et les dialogues, le scénariste
du film Thierry Thomas a cherché à rester fidèle
à l’esprit de la bande dessinée.
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Non pas que les auteurs
aient transposé l’album à la lettre, mais les
libertés qu’ils se sont accordées devaient s’inscrire
dans la " magie " de l’œuvre d’Hugo Pratt,
en conservant ce qui rend cette œuvre si unique, c’est à
dire à la fois les différences de complexité
des récits, les ruptures de ton, le côté
hors norme du personnage, les enjeux décalés.
En effet, l’histoire
de Corto Maltese en Sibérie comme les autres histoires,
repose sur des enjeux déplacés. " Le
plus complexe ", explique Thierry Thomas " a
été que les enjeux sont obscurs. Comme au théâtre,
on les découvre progressivement. Par exemple l’enjeu
de Corto Maltese en Sibérie n’est pas la quête
du train rempli d’or : ce récit raconte l’histoire
de rendez vous manqués avec des femmes. Toute la difficulté
consistait à la traduire dans le film. "
Comme pour le graphisme, ce qui marche pour la BD ne fonctionne
plus au cinéma.
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