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Le conte au cœur de l’univers grimalien

La reine des neiges (c) D.R.

La dimension littéraire est au cœur de l’œuvre construite par Paul Grimault. En effet, une des caractéristiques de la carrière du cinéaste est l’adaptation répétée des contes d’Andersen avec notamment Le Petit soldat et La Bergère et le Ramoneur. Avant d’adapter la Bergère, Grimault s’était intéressé à d’autres histoires d’Andersen : Les Cygnes Sauvages et surtout La Reine des Neiges. Un conte qui a inspiré le cinéaste tchécoslovaque Snezhnaya Koroleva en 1957 avec un film mélangeant animation et vrais acteurs et plus tard en 1966, le cinéaste russe Gomadi Kazansky qui réalisa le film d’animation La Reine des Neiges.

Même si l’écrivain danois est souvent taxé de mièvrerie notamment dans La Petite marchande aux allumettes, ses contes allient souvent le merveilleux à un réalisme noir franchement macabre, le tout accompagné d’une douce ironie.

C’est sans doute cette dimension qui attira Grimault. François Porcile dans Défense du court métrage français affirme : « Le monde de Grimault est proche de celui du conteur danois. D’un côté des personnages attachants, naïfs, enfantins, de l’autre : la méchanceté et l’hypocrisie concrétisée par des personnages inquiétants chaussés de godillots à clous et armés de parapluies. Cette lutte du merveilleux et de la cruauté est le dénominateur commun de l’œuvre de Grimault ». Un conflit qui se retrouve aussi dans l’œuvre de Jacques Prévert. « Les enfants qui s’aiment, s’embrassent debout contre les portes de la nuit » avec toujours un diable sorti de sa boîte ou un roi tyrannique pour contrarier leur amour fou.


Quand Grimault rencontre Prévert

  Jacques Prévert (c) D.R.

Le Roi et l’Oiseau représente la seconde et ambitieuse collaboration de Grimault avec Jacques Prévert après Le Petit soldat en 1947 pour lequel Prévert a co-écrit le scénario. Les deux poètes imposent une originalité de pensée et d’écriture qui n’est pas sans rappeler les collaborations artistiques des surréalistes. Le mouvement surréaliste a d’ailleurs beaucoup marqué Grimault notamment dans Le Marchand de notes dont la fantaisie délirante possède quelque chose de surréaliste.

André Bazin dans le numéro 16 des Cahiers du Cinéma en octobre 1952 a pointé les multiples rapprochements entre les films de Grimault et les autres œuvres de Jacques Prévert : « La continuité du récit procède moins des articulations de l’intrigue que de subtils enchaînements poétiques où se retrouvent par l’image, les thèmes et la manière de Prévert. (…) A l’univers du Roi méchant, à son palais truqué, à la ville de marbre somptueuse et vide comme un tableau de Chirico, s’opposent les quartiers souterrains où le soleil ne pénètre jamais mais où chante l’aveugle qui croit à la lumière. »

Freddy Buache, critique et ex-directeur de la Cinémathèque Suisse, voit dans Le Roi et l’Oiseau « un poème jeune et frais comme ceux de Jacques Prévert » et l’apparente « aux œuvres nées avec le groupe Octobre » (voir biographie). Quant à Jacques Siclier, critique et historien du cinéma il salue dans le chef d’œuvre de Grimault « l’accomplissement du réalisme poétique dans le cinéma d’animation français ».