CHRISTINE
CARRIERE Réalisatrice de
Rosine dans le nord
Entretien réalisé à Paris en 1999
Par Bernard PAYEN
Premier long métrage de Christine
Carrière, issue des rangs de la Femis, Rosine,
tourné en 1994 dans le Nord de la France, est une chronique
réaliste et poétique " à la
Pialat ", centrée sur les problèmes
d'une jeune adolescente mal dans sa peau. Sec, cru, et sans
complaisance, le film prolonge le thème des rapports
père-fille évoqués par la réalisatrice
dans son court métrage Mariage Blanc. Retour
sur les propos de la cinéaste recueillis en mars 1995,
alors que son deuxième long métrage Mais
qui plume la lune ? est sorti en salles en décembre
1999.
" Le goût du cinéma
est venu assez tard chez moi. Ma grande sur me traînait
dans des séances d'art et essai, il y avait un vrai
plaisir de spectatrice. Il y avait aussi à l'époque
une fascination pour les salles. Cela régresse aujourd'hui
même si on retourne dans certaines salles de province
vers des décors à l'ancienne, avec balcon, etc.
On retrouve un peu aujourd'hui le plaisir d'aller dans des
jolies salles avec des fauteuils rouges, mais il y a encore
plein d'efforts à faire... "
LE NORD
" Pendant mes trois ans passés
à la Femis, j'étais entourée de beaucoup
de gens des Cahiers du Cinéma. Quand j'ai
fait mes premiers films, ils étaient très
étonnés qu'on puisse filmer des lieux comme
les villes et les paysages du Nord, parce que tout ce qui
sort de Paris intrigue tout le monde. Heureusement ça
change maintenant, on commence à tourner en province,
(en plus les tournages à Paris sont compliqués),
mais il y a toujours quand même une peur de sortir
de la capitale. Moi ça m'intéresse plutôt,
au contraire. J'ai envie de m'adresser à des gens
à qui on ne s'intéresse pas trop. Les films
tournés hors Paris sont en outre tout de suite considérés
comme des films sociaux ! C'est un peu bizarre. "
(...) Xavier Beauvois est du Nord, donc
il a tourné son film dans sa région ;
moi j'ai filmé en Picardie et un peu plus haut...C'est
parce qu'on a envie de tourner là où on est
bien. On en a peut-être marre aussi que personne n'aît
vraiment osé aller tourner ailleurs. J'ai plein d'amis
qui vont tourner dans le Sud aussi. Chacun son identité.
Ce sont des gens qui osent leur différence. Cela
dit, en y réfléchissant, comme les mines ferment
dans le Nord, on avait peut-être envie inconsciemment
d'enregistrer une culture et des décors qui vont
certainement se modifier. "