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Fanny Ardant (c) D.R. FANNY ARDANT
" Je crois en la magie
des choses sans
cesse renouvelée "
Entretien réalisé à Paris
le 10 mai 1994
Par Bernard PAYEN


La rencontre avec Fanny Ardant découle d'une succession de hasards, prolongés par la volonté inexorable de rencontrer la comédienne. Deux brèves entrevues fortuites avec la comédienne, puis une négociation avec son agent d'Artmédia (pour qui un interview hors période de promotion est à bannir) ont finalement engendré un entretien d'une heure et quart, tournant autour de l'enfance, de la comédie et de la littérature. Discussion avec une femme passionnée, enthousiaste et altruiste, bien loin des clichés la qualifiant de froide et arrogante.


  La vie est un roman (c) D.R.
" Dès l'enfance, puis l'adolescence, je trouvais que tout ce qui était beau devait être proféré, un peu comme quand on dit à quelqu'un " écoute ! " et que l'on dit à voix haute ce qu'on était en train de dire tout bas. J'étais attiré par les mots, davantage par le théâtre que par la poésie, curieusement. Tout cela est très obscur quand on a 14 ou 15 ans, mais on trouve que la langue est tellement belle et les sentiments tellement forts, qu'on ne peut les lire tout bas dans son lit. A l'opéra, les sentiments sont toujours plus exaltés, je me disais alors que la vraie vie, c'était là, de l'autre côté de la barrière. Je trouvais qu'à l'opéra, malgré les flots de sang et l'évocation de la mort, c'était quand même la vérité, et qu'on mettait toute une vie à dire des choses que les chanteurs ou les comédiens disaient en une heure et demie. J'étais assez attirée par cette idée de vivre intensément toute une vie pendant une heure et demie. "

(...) " Je ne vivais pas dans un milieu qui me prédisposait à faire ce métier, mais mes parents adoraient la littérature et la musique. Si on ne fait pas ce métier pour de vraies raisons (autrement dit " parce qu'on l'aime, on l'aime "), cela devient trop difficile. Je comprends donc les inquiétudes des parents dont les enfants veulent devenir artistes. Quand j'ai voulu devenir actrice, je ne pense pas que c'était pour moi une manière de me rebeller contre mon milieu. De toute manière, je n'ai jamais raisonné en terme de " milieu ", ni de " classe sociale ", je dis toujours " 1+1+1 " : chaque être transporte avec lui son goût de vivre et son idée du monde  : il n'y a que cela qui m'intéresse. Je n'aime pas les clans, les castes, ni les familles d'esprit. Peut-être qu'à force d'avoir vécu dans mon " milieu ", j'ai vu ses qualités et ses défauts, les choses ridicules... Je m'apercevais d'ailleurs davantage des ridicules d'une famille, à travers la littérature, comme si un livre ou un film constituaient ainsi une sorte de boomerang. J'ai toujours pensé qu'on gagnait du temps à lire les romans, puisqu'ils nous aident à reconnaître ensuite dans la vie les voleurs, les hypocrites, ou les absolus, les romantiques. Avec cette idée que si on avait lu Balzac ou Flaubert, on gagnait du temps dans la vie. "