Objectif Cinéma : Ton
film a un parti pris formel et technique important puisqu'il
a été tourné en super 8. C'est un acte
fort, audacieux, surtout à l'époque du numérique
et de la caméra DV. D'où est venu le choix de
ce format ?
Raphaël Nadjari :
La plus grande difficulté, c'est de savoir quel va
être le format le plus juste par rapport à l'histoire
que tu vas raconter. Outre le pari technologique, il y a un
autre pari, celui de faire un film en quinze jours, en impro,
dans cette forme la plus barbare de cinéma qu'est le
super 8. La révolution numérique, c'est la réunion
de tous ces médias (dont le DV) en une seule forme
: tôt ou tard, on va pouvoir filmer avec n'importe quel
format, à partir du moment où il se justifiera
vis-à-vis d'une histoire. Je croyais au super 8 pour
ce film, c'est un format fragile, mystérieux, un peu
graineux, un peu abîmé, un peu brut, qui fonctionnait
bien avec l'histoire que j'allais raconter. La révolution
numérique, c'est comme pour toutes les révolutions
de l'histoire du cinéma, il y a un temps où
les gens qui font des images peinent à s'approprier
l'ensemble des termes de la révolution en cours.
Objectif Cinéma : Y-avait-il
une sorte d'acte de foi dans le cinéma, dans un rapport
originel à l'image cinématographique ?
Raphaël Nadjari : Oui.
On a tourné comme dans les années 30. On a
découvert qu'il n'y avait pas de retour vidéo
sur le plateau, qu'on n'aurait pas de rushes avant quinze
jours, qu'on n'aurait pas de retour son, qu'il y aurait
des problèmes pour synchroniser le son etc. On a
découvert qu'il fallait travailler dans la plus grande
rigueur cinématographique possible parce qu'on avait
une petite bobine et qu'il fallait absolument resserrer
le tournage à sa plus simple expression.