Objectif Cinéma :
Es-tu d'accord avec l'idée de retour aux sources
?
Raphaël Nadjari : Oui,
c'est assez brutal, assez primitif. Je n'ai pas une conscience
théorique de ces choses là. Je me suis dit
que j'allais raconter une histoire entre le film de genre
et le film de famille. J'ai donc pris une pellicule ( la
200 T) qui me permettait de faire un film noir, et de la
super 8 parce qu'elle me permettait de travailler le grain
et la fragilité du regard du personnage.
Objectif Cinéma :
Avec ton chef opérateur Laurent
Brunet, déjà présent sur The Shade,
comment avez-vous abordé le travail particulier de
la lumière ?
Raphaël Nadjari : Si
Laurent Brunet voulait faire une bande démo, ce n'était
pas vraiment le lieu. Il s'est tapé une leçon
que beaucoup de chef-opérateurs devraient prendre,
il s'est coulé dans l'énergie fragile de cette
caméra qui était de prendre tout ce qu'on
pouvait pour raconter une histoire. La pellicule 200T nous
a beaucoup aidé pour cela parce qu'elle nous a permis
de tourner à n'importe quel moment, dans n'importe
quelle condition. Alors, bien sur, tu te rends compte de
la radicalité du support mais par cette radicalisation,
on s'est libéré, on a eu peur. Au bout d'un
moment, tu ne fais plus de cinéma, tu fais des plans.
D'un coup, tu reviens à cette idée du plan.
Objectif Cinéma : Le
choix de cette pellicule super 8 était-il aussi une
volonté de dresser un portrait particulier de New-York
?
Raphaël Nadjari : Oui.
En fait, c'est une pellicule de surveillance de centrale
atomique. Sa couleur d'aujourd'hui ressemble à ce
qu'a dû être le 16 mm dans les années
60. On y retrouve une certaine nostalgie.
Objectif Cinéma : Passons
à l'histoire. On retrouve dans I'm Josh Polonski's
brother un thème déjà très présent
dans The Shade : la violence économique ?
Raphaël Nadjari : Qu'est-ce
que tu veux dire ? C'est un concept théorique. Tu
parles du rapport à l'argent?
Objectif Cinéma : Oui.
Tu inscris tes personnages dans la petite entreprise, le
petit commerce. Ils doivent se battre pour vivre.
Raphaël Nadjari : L'argent,
quand il est mal utilisé, peut être un pouvoir,
une façon de contrôler quelqu'un, une façon
de libérer quelqu'un, un moyen de très bien
vivre. Ca peut révéler un personnage : on
sait alors s'il est avare, méchant etc. Le rapport
à l'argent simplifie beaucoup l'exploration des liens
de famille. C'est vrai que je parle de la petite entreprise
: le petit épicier, le marchand de tissus, dans The
Shade, c'était le prêteur sur gage.