Annuaire boutique
Librairie Lis-Voir
PriceMinister
Amazon
Fnac

     


 

 

 

 

 
Le Souffle(c) D.R.

Objectif Cinéma : Dans cette ambiance animale, l'acte de tuer peut-il se voir comme la retranscription du rituel boucher entre l'homme et la viande (la bête) ? Comme une fatalité…

Damien Odoul : C'est très juste… Au fond, je n'ai pas parlé de ce rapport-là. L'acte de tuer me semble essentiel : si de nos jours, on ne peut tuer personne, tuer les animaux paraît plus simple. On tue un mouton, on dépiaute un lapin, on a un rapport avec la mort : pour un lapin, il faut aller vite, lui arracher l'œil, que le sang tombe, puis le déshabiller… Après, tout le monde est content de dîner autour d'un bon lapin, n'est-ce pas ? Ce rapport-là est nécessaire. Ce garçon ne tue pas, il n'est pas un meurtrier au sens des teenagers, c'est plus complexe. Il voit tuer. Et s'empare d'un coq, lui arrache ses plumes… Mais, en même temps, il ne faut pas oublier qu'il enterre le lapin. A ce moment-là, il est aux bords des larmes et fait une espèce de rituel complètement à lui : il lui rend hommage. Je ne suis pas simplement avec cette cruauté de l'enfance : on fait fumer le crapaud, ou je ne sais quoi...


Objectif Cinéma : Musique chrétienne (Purcell, Bach), noir et blanc somptueux (L'Evangile Selon Matthieu), figure ambiguë sans morale et ambiance christique : on pense malgré tout à Pasolini…

Damien Odoul : Justement, j'ai voulu éviter tout ça : c'est tellement facile. Et ayant connu moi-même des lycées catholiques… Mais comme un cancre, un révolté, puisque personne ne voulait de moi…

  Le Souffle (c) D.R.

Objectif Cinéma : Adolescent, tu as vécu là-bas (dans le Limousin). Comment as-tu pu créer de telles fulgurances poétiques, qui puisent dans ton adolescence ?

Damien Odoul : C'est passé par mon expérience de la vie, mon expérience brutale. Mais il était hors de question que je raconte quel garçon j'étais, à 15 ans. En vieillissant, les choses reviennent. Je me suis rendu compte que cela a été un moment de ma vie déterminant ; la bascule, en effet, où ça pouvait très mal se terminer...


Objectif Cinéma : Le désir de fuite du personnage est donc autobiographique…

Damien Odoul : Oui, bien sûr, et l'ennui aussi. L'errance et l'ennui sont des familiers. Je voulais montrer à la fois son errance intérieure et son errance géographique. Et cette manière qu'il a de bouger : s'il arrête de bouger, il meurt. Il meurt d'ennui, il meurt de sa propre douleur. Et d'être un cas oedipien, au fond, un fils sans pères ; d'être un rageur, d'être quelqu'un qui a des comptes à régler. Mais là, ce n'est pas moi, je parle du personnage.