Objectif Cinéma : Parmi
les comédies que vous avez réalisées,
Marche à l'ombre affichait une esthétique particulière...
Eduardo Serra : Normalement,
la comédie n'est pas très intéressante
photographiquement parce que la lumière n'y est pas
un élément de la construction du récit,
alors que sur un film policier par exemple, la lumière
est presque plus importante que l'histoire. Sur une comédie
c'est l'action et non la lumière qui peut faire rire.
On tend donc à une lumière plate, uniforme juste
pour voir ce qui se passe. C'est pour ça que la comédie
est mal vue, et n'a pas beaucoup de prestige côté
photo. Mais dans Marche à l'ombre, on a pris le contre-pied
des techniques photographiques de la comédie. C'était
plutôt des clairs-obscurs, Michel Blanc avait souhaité
tourner avec des focales très longues et les décors
ont été choisis en fonction. Mais personne ne
l'a remarqué...
Objectif Cinéma : Marche
à l'ombre était plus ambitieux sur le plan visuel
que Grosse Fatigue...
Eduardo Serra : Oui.
Il y avait un net recul sur ce plan avec Grosse fatigue,
même si j'ai essayé de jouer sur les parties
réalité et cauchemar, en utilisant notamment
des pellicules différentes. Michel n'avait plus envie
de recommencer quelque chose d'aussi marqué photographiquement.
Le sujet s'y prêtait moins, c'était moins extrême.
Même s'il y avait des parti-pris, ils ne tranchaient
pas radicalement avec une lumière normale.