Pour la sortie d'un livre d'entretien
écrit par Serge Grünberg, consacré à
son uvre, David Cronenberg, le réalisateur de
Crash avait prévu un grand programme promotionnel
lors de sa venue à Paris, conférences, rencontres,
séances de dédicaces. Une grande rétrospective
a été consacrée à son uvre,
ainsi qu'une exposition regroupant objets de tournage, de
collection, à la Maison du Canada. Fascinée
par l'étonnant contraste entre les films gores, torturés
de Cronenberg, et l'image sereine, sympathique que l'homme
renvoi, je me suis rendue à un entretien public organisé
à la FEMIS. Dans une ambiance intime et détendue,
avec une assemblée constituée d'étudiants,
le cinéaste s'est révélé très
accessible, ouvert, drôle, pudique et réservé.
Pendant près d'une heure trente, Cronenberg est revenu
sur la création de ses films.
Objectif Cinéma : M.
Cronenberg, nous vous recevons aujourd'hui dans un cadre étudiant,
à la FEMIS, est-ce que vous pensez que l'enseignement
du cinéma est souhaitable et possible ; et si c'est
le cas, qu'est-ce qu'on peut transmettre et apprendre ?
David Cronenberg :Je
n'ai jamais fait d'école de cinéma, je suis
autodidacte. J'ai commencé à faire des films
au milieu des années soixante sur le tas, sans formation.
Je pense que contrairement à la littérature,
le cinéma peut être enseigné, car c'est
un médium qui amène différentes personnes
à collaborer, et qui utilise beaucoup de technologies.
L'enseignement est donc possible et même souhaitable.
D'ailleurs certains étudiants sont devenus aujourd'hui
de grands cinéastes.
Objectif Cinéma :Vous êtes toujours ouvert
à l'extérieur, à des sollicitations
personnelles pour The Blood par exemple, ou à
une suggestion de producteur pour Crash, ou aux nouvelles
technologies pour Vidéodrome, Existenz, ou
à des rencontres pour Existenz encore. Est-ce
que maintenant, vous avez des choses à l'intérieur
de vous qui n'ont pas encore été développées
ou est-ce que votre inspiration vous vient seulement de
l'extérieur ?
David Cronenberg :J'espère
que oui, sinon je suis fini comme cinéaste (rires).
Pour moi, le sujet, le noyau du film, peut surgir de n'importe
où. Selon mes propres expériences, l'inspiration
peut me venir d'un rêve, d'un article dans le journal,
d'un événement qui m'arrive, un scénario
peut avoir comme base un concept très abstrait, ou
l'idée d'un personnage. Je ne sais pas exactement
d'où ça vient. Après, le passage à
l'extérieur, à la réalisation est une
autre affaire. Actuellement, j'ai deux scénarios
qui n'ont pas encore été tournés. Le
cinéma, c'est la frustration, c'est difficile et
complexe.