PREMIER FILM
Michel Boujut : "
Pour moi, c'est un souvenir pré-cinéphilique,
un souvenir de cinéma du samedi-soir. Mais quand
j'y repense, c'est beaucoup plus beau... Quand je revois
la moto, mon père, ma mère, les beaux paysages
de Charente, les prairies au bord de l'eau : c'est plus
important que ce premier film vu, film d'Henri Calef, que
j'ai d'ailleurs revu depuis, l'un de ces innombrables films
d'exorcisme, où les français voulaient se
voir mieux qu'ils n'étaient ! (...) Mes premiers
souvenirs de cinéma sont liés à cette
petite salle de cinéma disparue, qui s'appelait le
Vox. Ce sont les westerns qui m'ont réellement donné
le goût du cinéma, le goût d'en savoir
plus sur le cinéma. Avant tout le reste, ce sont
vraiment les westerns qui m'ont ébloui le plus...
"
(...) " Je ne faisais pas alors ce
que faisaient des cinéphiles en culottes courtes
comme Truffaut, noter des génériques par exemple...C'est
seulement beaucoup plus tard que je me suis rendu compte
à quel point étaient importants le réalisateur,
le scénariste...à 14-15 ans. Le cinéma
de mon enfance n'avait qu'une salle, le choix était
donc très limité. Quand il y avait des westerns,
je m'y précipitais, mais il y avait tout le reste,
toute la production française de l'époque,
les " nanars " d'aujourd'hui qu'on découvre,
qu'on revoit avec plaisir, parce qu'ils témoignent
d'une époque et nous montrent une ville, Paris ou
autre, qui n'existe plus...mais ce n'était pas très
passionnant...J'ai commencé très jeune à
lire le journal " Arts " : c'était la culture,
Paris qui nous arrivait dessus, nous pauvres provinciaux
! et en particulier les chroniques de François Truffaut.
Il parlait de films que je n'avais pas vus pour la plupart,
parce qu'ils ne passaient pas, mais j'étais d'accord
avec lui, par principe ! Et surtout quand il était
méchant, c'était extraordinaire ! Je n'en
revenais pas alors qu'on puisse écrire aussi librement
sur le cinéma ! Avant, j'avais eu entre les mains
Cinéma 58, 59, etc, ou encore Cinémonde, bien
sûr, avec de belles photos d'actrices ! Il n'y avait
aucune position critique, tous les films se valaient...Quand
Truffaut est arrivé derrière, ce fut un choc
réel ! C'est du reste le premier critique que j'ai
lu. Puis il y a eu Bazin, Bory, et beaucoup d'autres...
"