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Le Doux Amour des hommes (c) D.R. JEAN-PAUL CIVEYRAC
Réalisateur
Entretien réalisé
à Paris, le 15 octobre 2001
Par Bernard PAYEN


En 1996, Ni d'Eve ni d'Adam, le premier long métrage de Jean-Paul Civeyrac, sorti de la Fémis cinq ans plus tôt, impressionnait par sa violence sourde et placide, son lyrisme et sa fougue tantôt contenue, tantôt explosive.

Les solitaires, sorti en 1999, puis encore et surtout Fantômes et Le doux amour des hommes, distribués par Magouric en ce début d'année 2002, ont confirmé l'importance du cinéaste. Entretien.



  Ce doux amour des hommes (c) D.R.
Objectif Cinéma : Comment sont nés ces deux films, Fantômes et Ce doux amour des hommes ?

Jean-Paul Civeyrac : Après Ni d’Eve, ni d’Adam, j’ai écrit un scénario, Le doux amour des hommes, qui a été présenté à l’Avance sur recettes. À partir de là, j'ai attendu deux ans avant d'obtenir le financement pour faire ce film.

Pendant ces deux années, j’ai proposé à mon producteur, Philippe Martin, de tourner quand même quelque chose. Je n’avais pas du tout envie de rester sans rien faire. Les solitaires a été tourné à partir d’un scénario écrit en trois semaines. C’est un film fait avec un matériel très léger, je ne voulais pas promettre de résultat, j’avais annoncé que ce film resterait peut-être ensuite dans une boîte. Mais le film a plu à Philippe et à Régine Vial des Films du Losange, qui a voulu le distribuer, et Les solitaires s'est transformé en film à part entière.

Les Solitaires (c) D.R.
L'année suivante, j'ai voulu faire un film sans scénario, en partant avec un simple canevas (l’histoire d'un jeune garçon qui quitte son premier amour, va chez son cousin, et à la fin du film, retourne chez lui, et s’aperçoit qu’il est toujours là), puis en tournant en plusieurs périodes, de manière aussi légère que Les solitaires.

Des histoires parallèles se sont greffées au fur et à mesure sur ce canevas. Il y avait aussi l’idée des contes, ces histoires de fantômes, ces gens qui disparaissaient du jour au lendemain. On a tourné en quatre fois, quatre périodes d’une dizaine de jours, de décembre à juillet.

À l'issue du tournage, le budget pour Le doux amour des hommes n'était toujours pas réuni. J'en ai conclu que ce film était impossible à faire avec huit millions de budget. Je l'ai réécrit dans l'optique de le tourner avec le minimum, c’est-à-dire l’avance sur recettes. J'ai complètement modifié l’histoire initiale. Le doux amour… devrait être mon deuxième film, et il est devenu le quatrième, mais un peu contre mon gré.



  Les Solitaires (c) D.R.
Objectif Cinéma : Fantômes est très proche des Solitaires. Je pense à l'aspect polyphonique, la présence des fantômes, les scènes de poursuite dans l’appartement ou de corps à corps…

Jean-Paul Civeyrac : On pourrait dire qu'il existe des "fondus enchainés" entre les films. Les Solitaires reprenaient d’une autre manière la fin de Ni d’Eve ni d’Adam. Je pense particulièrement aux scènes dans la grange avec les deux adolescents, à ce moment où ils sont dans un petit espace obscur, très peu éclairé, quand ils se touchent, sont très proches et très intimes. J’ai eu le sentiment que Les solitaires reprenaient cela, beaucoup plus que les scènes de la partie urbaine du film.

En réalisant Fantômes, j'avais l’impression de reprendre un peu les histoires de fantômes dans les Solitaires. Je grossissais cet aspect. Dans Fantômes, le corps à corps des deux amants attachés fait aussi penser à cela. Comme des rimes. L’aspect fantastique des Solitaires est également repris, et rendu de manière plus polyphonique dans Fantômes. Dans Le doux amour, je délaisse l'aspect fantastique pour privilégier l'érotisme et la parole. Il y a beaucoup plus de dialogues dans ce dernier film.